Slipknot: un cas d'école difficile... Il faut dire que ces neuf joyeux drilles alimentent la controverse artistique, en ces temps où ils sortent un troisième album des plus réussis, quoi qu'on puisse en dire. C'est clair: j'ai changé d'avis sur ce groupe avec la sortie du troisième album. Plus mélodique, plus travaillé, plus abouti et plus technique, Vol. 3: The Subliminal Verses m'a (très) étonnamment surpris, puis même, ensuite, je l'avoue sincèrement, bluffé. C'est donc armé d'une approche différente que je chronique Iowa même si, fondamentalement, mon premier avis sur la question n'a guère changé. Je trouve toujours cet album à la limite de l'insupportable, voire de l'inaudible par moments. Attention, je ne cracherai pas sur le contexte Slipknot, mais j'aurai du mal à conserver toute bénédiction sur la teneur musicale à proprement dit de cet album. Voyons voir, alors.
Je passerai sur l'étrange succès commercial du groupe, qui m'a toujours intrigué, du moins jusqu'à aujourd'hui. Pourquoi autant de foin à propos d'un groupe qui emprunte finalement tous ses codes de communication à d'autres et n'a, en fin de compte, pas du tout inventé l'eau chaude? En commençant par le nihilisme marqué (au sens propre comme au figuré) de la majorité des textes. Provocation facile et avant tout calculée, pour aller littéralement vomir un gentillet "People = Shit" à son public aveuglé, sans qui cependant le groupe n'existerait même pas. Bah, d'ailleurs cette question à leur propos m'aura toujours fait bien rire.
Maintenant au niveau technique et musical, sur quoi Iowa fonde-t-il sa notoriété? Trop facilement classés dans la branche néo-metal (ils n'ont d'ailleurs absolument rien de néo), le thrash/death que nous propose Slipknot sur ce disque est tout simplement bien pauvre. Une unique constante avec le troisième opus du groupe: un batteur démentiel et incroyable en la personne de Joey Jordison, sans qui finalement le groupe n'aurait rien de bien technique à proposer sur Iowa. Les compositions se distinguent toutes plus ou moins par leur absence de mélodie, à part sur "My Plague" (le seul morceau doté d'un refrain excellent et entêtant: là est la solution!) qui relève une fois, avec "Iowa" (le long épilogue de l'album, à l'ambiance dévastée) le très faible niveau mélodique de l'ensemble. Sinon, tout n'est que haine, violence froide et butée. "The Heretic Anthem", "The Shape", "Left behind" sont horriblement livides, robotisés et démotivés. Il ne suffit pas, encore une fois, de quelques riffs saturés à l'écoeurement et de quelques (mémorables, ok!) cognements de batterie, alignés les uns à la suite des autres, sans construction logique ("The Shape"), ni diversité ("Skin Ticket" ou "New Abortion", exemples-types de brutalité inutile) pour créer un bon titre. Et ça ne changera pas de sitôt.
Le seul lien commun à tous les morceaux: l'absence de but. Où Slipknot veut-il en venir? A part déverser et vomir des hectolitres de violence froide et inutile, Corey Taylor de beugler sa haine au travers d'un chant au demeurant puissant (inspiré d'un certain Max Cavalera, sans doute...) mais abrutissant (faute à une production unilatérale et à une absence quasi-totale de vocaux clairs) et finalement peu menaçant (le « fuck » est d'une crédibilité folle...), où est l'utilité d'un tel message, si message à passer grâce à ce disque il y a? Le pire, c'est que tout ce que propose Slipknot avec Iowa n'est pas nouveau (les masques, le nihilisme, les signes pseudo-sataniques et j'en passe). D'accord, dans la forme, ce sont d'incroyables showmen sur scène, ça, on ne pourra pas leur retirer. Mais dans le fond, Iowa est creux et vide de sens.
Je vois d'ici ce que mon avis pourrait à la rigueur soulever comme protestations... Mais cet avis est pourtant clair: avant ce fameux album-charnière qu'est dorénavant Vol. 3 : The Subliminal Verses, j'abhorre ce qu'a pu faire Slipknot, non pas pour ce qu'ils représentent, mais pour leur musique en elle-même. De la fumée sans feu. Un succès commercial totalement injustifié d'un point de vue purement artistique et musical, à part le fait qu'une portion de jeunes ait pu reconnaître en Slipknot une catharsis exemplaire. Après, j'applaudis à deux mains, après une telle évolution (maturité artistique?), comme Corey Taylor et sa bande ont pu en faire preuve avec Vol. 3 : The Subliminal Verses. Et j'attends un quatrième album de cette trempe-là, pas de l'autre, hein les mecs.