Notre sympathique entité Belenos qui opère dans le massacre à la bretonneuse nous revient gracieusement en 2010 pour nous abreuver de bretonneries. D'ailleurs, à bretonner si fort, voilà que le breton est appelé à la rescousse pour les paroles. Loïc Cellier est bel et bien définitivement un breton fort fier de ses origines bretonnes. La Bretagne à l'honneur semble être la raison-d'être de ce Yen Sonn Gardis qui non content d'en étrenner la langue, livre quelques instruments bretons en supplément gratuit de bretonnade. Mais la question brûle toutes les lèvres extra-bretonnes : ce disque est-il bretonnement bretonnant ?
Amis, soyez ivres de joie, car le virage vers la source de Chemins De Souffrance est ici conforté. On retrouve avec plaisir le son Belenos si organique et les compositions pagan teintées d'influences de la pointe occidentale de l'Europe. Si Errances Oniriques reste la référence, les compositions ici proposées sont d'un niveau agréable. Le blast est moins frénétique, ce qui peut être considéré comme un mal (votre serviteur le pense) car il sied si élégamment à la fureur celtique du groupe. Quoiqu'il en soit, on ne peut qu'être ravi de voir les influences guerrières de Chants De Bataille appartenir au passé. Les riffs proposés sont tantôt mélancoliques, tantôt incisifs, tantôt mélodiques. Ils apportent une grande diversité au paysage musical couvert par ce disque, et sonnent comme la marque de fabrique de Loïc Cellier, le maître à penser unique du groupe.
En effet, en se chargeant d'absolument tout mis à part la traduction des paroles en breton et anglais, il confirme plus que jamais son omnipotence sur la formation. Y a-t-on perdu au change ? Probablement. Car s'il se révèle un batteur plus que capable, maîtrisant les blasts et les breaks, on regrettera le naturel si violent de Errances Oniriques. Pour les riffs, ayant toujours été à la barre, point de surprise. On notera avec amusement que les chansons ont toutes été composées dans un passé plus ou moins lointain puisqu'elles datent d'entre 2001 et 2009. C'est une tradition Belenos que d'avoir des compositions anciennes, et la voilà respectée. Amusant. Cela n'empêche aucunement les chansons de s'exprimer pleinement même si encore, leur manque de peps est répréhensible. Loïc Cellier s'est-il assagi ? L'âge avançant le rythme tend à baisser et ça reste dommageable.
Le naturel blasté de Belenos était une seconde nature qui lui manque ici. Certes, ils sont toujours présents, mais moins abondamment, et non compensés par des rythmiques rapides la plupart du temps. Cela rend l'album un peu plat par moments en corollaire. Le fan de Belenos doit en être conscient car même si le retour dans le passé est palpable, des choses se sont perdues en route. Cela n'emppêche pas des titres comme "Hollved hirisus" et "Taol-digoll" de réjouir par leur science du riff, du changement de rythme et de la mélodie qui sait se faire acoustique comme à l'accoutumée. Par contre, ce qui n'a pas été perdu, c'est le chant. Le raclage black metal est toujours un plaisir à écouter, strident, violent et éloquent, il est réellement au service de la musique. Les choeurs grandiloquents si chers à Loïc Cellier sont aussi encore de la partie … il faut savoir les apprécier, mais leur gros problème, c'est qu'ils se répètent en permanence. C'est la patte Belenos …
Cet album provoque certains émois simultanément à quelques exaspérations. L'émotion l'emporte néanmoins pour donner un disque recommandable aux fans du groupe et aux amateurs de pagan. La Bretagne peut être fière qu'un de ses descendants se batte avec autant de hargne pour en défendre la culture. Qui plus est, les faux airs de Seigneur Des Anneaux de la langue bretonne ajoutent indéniablement un petit cachet à l'ensemble.