En 2012, c'est le retour des Allemands de Black Messiah ! Pas si connus que ça, mais un peu quand même. Après un The First War of the World plutôt convaincant (même si, sur nos pages, il semble que les avis divergent), ils nous reviennent cette année avec toujours un nom en The, cette fois-ci c'est The Final Journey et la pochette est moche comme tout. Voilà, c'est dit, mais l'habit ne fait pas forcément le moine non plus. Donc on peut avoir bon espoir sur le contenu. Mais plutôt que de le juger sur son habillage, autant le faire directement sur la musique. Qu'est-ce que ça donne, au final, ce nouveau brûlot ?
Disons que la recette n'a pas vraiment changé, et que sans parler d'une réelle originalité, on reconnaît bien notre formation en provenance d'Allemagne au moment où les premières notes débarquent, car la recette musicale reste foncièrement la même : pagan/black un peu heavy sur les bords, mais le tout, bien sûr, plutôt accessible et qui pourrait plaire à un large public (ne vous imaginez pas tout de suite que c'est des vendus en revanche, messieurs les trves !). En clair : on mise beaucoup sur une certaine efficacité, avec un réel sens mélodique, ce qui est un gros point fort pour le combo car les mélodies font souvent mouche, et sont assez bien ficelées dans leur ensemble (comme la plus black "Lindisfarne" qui est quand même rudement bien foutue). Sur ces points, la déception est évitée.
Ce qui n'est pas complètement absent, par contre, c'est le mauvais goût, présent sous la forme d'un chant féminin hésitant, qui ne semble pas avoir grand chose à faire ici, et surtout, qui n'est pas très beau à l'oreille, venant pénaliser un peu (mais pas trop, non plus) certaines pistes : "Mother Hel", au chant masculin réussi, ne trouvera pas le répondant nécessaire à l'arrivée de la demoiselle, pas mauvaise certes, mais à la voix linéaire, plate et molle, qui ne dégage aucune énergie, aucune émotion ou beauté. Dommage, car le mélange aurait pu être intéressant. Et puis, même le chanteur Zagan, parfois, semble en faire un peu trop. Son chant clair est bon, mais manque encore d'un petit quelque chose pour être pleinement satisfaisant (de l'émotion, sans doute). Quant à son chant black, il évite le criard, mais manque encore de maîtrise sur certaines expérimentations.
On notera une reprise de Candlemass à la sauce Black Messiah : "Into the Unfathomed Tower" du groupe suédois est ici transformée d'un doom mélancolique à quelque chose de plus agressif, et, même si l'adaptation est plutôt bien fait, cela ne semble pas prendre. Serait-ce le fait de dénaturer un peu ? Quoi qu'il en soit, la mayonnaise possède un goût bien étrange, comme si le registre ne convenait pas à celui du groupe allemand. Les compositions personnelles de la formation passent bien mieux, et leur agressivité nous fait quand même passer un bon moment. Le propos est plutôt varié, évitant une certaine linéarité, qui, dans un style comme celui-ci, aurait pu être un piège facile. Quelques agréables parties de violon agrémentent la musique, un peu de douceur qui fait du bien à entendre.
Mais à part "Lindisfarne", on ne retiendra aucun titre qui ne nous fera relever la nuit. Le niveau qualitatif est, certes, maintenu sur l'ensemble dans sa globalité, mais parfois, on se demande si Black Messiah ne se contenterait pas du minimum syndical : faire des pistes attrayantes, mais sans jamais qu'elles ne deviennent transcendantes. Du coup, tout est désespérément éclipsé par cet oasis d'excellence au sein d'un niveau acceptable, mais qui aurait pu être encore meilleur ! La frustration se mêle donc à la mixture, le plaisir prend un goût un peu plus amer, dont on se serait bien dispensé. Mais bon, une bonne production permet de mieux apprécier l'offrande, qui se voit ainsi un petit niveau au-dessus. Il est donc là, le problème de nos sympathiques Allemands : ils font les choses bien, mais pourraient le faire encore mieux ! Surtout que, par rapport à une rude concurrence, il sera difficile de se démarquer.
En clair, The Final Journey est un album plutôt bon, mais qui souffre d'un manque réel du petit plus qui fait toute la différence. Le talent de composition est là, le potentiel pour devenir encore meilleur également, il ne reste plus qu'à fusionner tous les éléments ensemble et Black Messiah pourrait bien devenir un nom à retenir par la suite. En tout cas, malgré toutes les qualités de cette œuvre, on peinera, pour les raisons citées ci-dessus, à revenir dessus, en dépit des bonnes impressions laissées. Même si, c'est vrai, écouter "Lindisfarne" ne dérange nullement. Oh, qu'est-ce que je viens de mettre ? Oh oh ...