Comment se remettre en selle après une vilaine vautre ? C'est là toute la problématique des Architects depuis la sortie de leur quatrième album. Après deux brulots et un troisième opus monstrueux qui avait attiré sur eux toute l'attention, les Anglais avaient directement tenté la case banco en sortant un quatrième skeud incomparablement plus mainstream et mélodique que tous les précédents réunis. Non seulement ce fut un échec critique flagrant, l'album s'étant fait défoncer de toutes parts « bukkake style », mais de plus, le succès commercial n'a même pas été au rendez-vous. Échec complet, perte de crédibilité, on pouvait donc légitimement craindre le pire pour ce cinquième album.
Mais il faut croire que les miracles existent, même dans ces contrées metalliques oubliées des Dieux. Alors que le groupe aurait pu complètement imploser suite à la vautre de l'assez lamentable The Here And Now (du moins en comparaison de son prédécesseur, le génial Hollow Crown), il n'en fut rien. La bande à Sam Carter s'est remis au taff, ayant bien saisi que ses velléités de tribuns d'un metalcore édulcoré pour ados ne trouveraient jamais l'écho suffisant pour passer dans la cour des grands. Le combo de Brighton, encore bien jeune malgré la sortie de ce cinquième album, a donc décidé de revenir plus près de ses bases techniques, violentes et groovy. Et, aussi incroyable que cela puisse paraître, c'est presque parfaitement réussi. Une foutue surprise que l'écoute de ce nouvel opus, Daybreaker, qui risque d'en étonner plus d'un par sa virulence, sa technique et la complexité de son écriture. « Trois pas en arrière », diront certains ; « Cinq pas vers la lumière surtout, ouais ! » répondra cet article. Parce que clairement, Architects n'est pas réellement revenu en arrière. Non, le groupe a juste réussi à ré-incorporer du méchant djent / metalcore à haute dose dans son petit délire émo friendly, et y est parvenu avec brio. Ainsi, des pistes comme ''Devil's Island'' ou ''Even If You Win, You're Still A Rat'' sont très proches de faire partie des meilleures baffes développées par Architects. Bref, à mi-parcours on serait tenté de se dire : « mais yeah ! Quel pur album ! ». Sauf que non, hélas. Tout n'est pas parfait, à commencer par LA scorie principale de cet cinquième opus, cette foutue voix claire de Sam Carter.
Clairement le bonhomme ne maitrise, en voix claire, que le chant émo plaintif à la crabcore dégueulasse (Sleeping With Sirens, Attack Attack, We Came As Romans et autres saloperies mainstreamo-subversives), et il en use malheureusement sur un grand nombre de morceaux, même les meilleurs. Et là, on peut balancer le même reproche que pour les autres groupes : un manque assez criant de cohérence avec le reste du morceau (passer d'un couplet bourrin / technique hyper groovy à un refrain émocore à mèches putassier, c'est juste schizophrène, cf ''Alpha Omega'' ou ''Outsider Heart''). Alors oui, des fois, ça colle assez bien à l'esprit du morceau (''Devil's Island''), mais de manière générale c'est juste gênant et ça gâche tout le kiff, qui est pourtant largement au rendez-vous tant certaines compos arrachent (''These Colours Don't Run'' par exemple, aurait pu être un affreux single « daytime radio » et se révèle en fait comme une des bonnes tueries de Daybreaker). Seconde critique, mais plus légère : les tracks ont tendance à se ressembler un peu, la faute à un hurleur certes efficace mais assez monocorde, bien que ses lignes de chant soient vraiment bien trouvées la plupart du temps, et à une prod' carrément aseptisée, dans les canons actuels du genre. On peut également bâcher l'affreuse balade éléctro-pop ''Behind The Throne'' rappelant les tracks les plus sombres de The Here And Now ou l'usage un peu abusif et répétitif de samples de cordes et autres éléments sympho un peu épiques, et ce même si ça fonctionne très bien sur certains morceaux. Au final, ces quelques petites déceptions (sauf sur le chant clair, là ça fait vraiment chier la vie par moments) ne sauraient masquer l'essentiel : Architects est vraiment de retour, et confirme bien que The Here And Now tenait plus de l'incident de parcours que de la volonté affichée de changer définitivement de direction.
Un très bon album de metal moderne donc, qui vient directement concurrencer les gros noms du genre comme Textures, Periphery, TesseracT ou Bring Me The Horizon (car il faut bien reconnaître qu'ils font partie des gros groupes actuels...). A écouter si vous aimiez Hollow Crown, le come back des natifs de Brighton vous fera chaud au cœur. A écouter également si vous aviez été assez fou pour aimer The Here And Now, les aspects mainstream étant toujours correctement représentés. A tenter d'écouter tout court. Une belle synthèse donc, et une belle surprise. Merci d'avoir redressé la barre les mecs.