Prenez des rengaines celtiques connues et moins connues du publique, rajoutez-y de grosses guitares, une voix douce, une voix grunt, rajoutez un soupçon de violon, saupoudrez de paroles sur la mythologie celte et vous obtiendrez la recette dont Eluveitie use et abuse à chacun de leurs albums. Est-ce le cas de leur sixième et dernière sortie ? On s’y attendait un peu mais... oui. En même temps, pourquoi changer une équipe qui gagne ?
Les suisses sont connus pour leur lenteur. Ainsi, lorsque la formation helvète enchaîna album sur album sans grand renouvellement, certains crurent que le groupe était juste lent à la détente. Il faut dire qu’après le sixième opus, on ne croit guère plus à cette hypothèse : Origins ressemble beaucoup à Helvetios qui lui-même ressemblait à Everything Remains et ainsi de suite. Cela ne veut pas dire pour autant qu’Origins est un mauvais album, loin de là. Mais ceux qui prendront le train en marche ainsi que les die-hard fans auront beaucoup de plus à l’apprécier que les pauvres hères qui attendent du nouveau de la part de la formation.
Ceci dit, Origins reste d’une qualité intrinsèque tout à fait appréciable. Bien produit, il est légèrement plus technique que son prédécesseur : on sent que les musiciens s’améliorent (la part belle est particulièrement donnée aux instruments celtiques, joliment maîtrisés). De plus, il tient mieux la longueur et se perd moins dans des pistes dispensables ; il en reste toujours mais ces dernières s’oublient parmi leurs consoeurs de meilleure qualité. Si Eluveitie ont toujours oscillé entre melo et death, ils parviennent sur ce dernier opus à équilibrer leurs tendances, offrant à l’auditeur des passages joliment mélodiques ("Vianna","The Call of the Mountain"), brutaux ("Inception") mais aussi des pistes où les deux se mêlent avec brio ("Celtos" et le très bon "King").
Cependant le sixième album des helvètes n’est pas non plus dénué de défauts. Outre sa peine à surprendre et faire du nouveau, il possède une première partie faible par rapport à la deuxième et des structures de morceaux parfois trop statiques. De plus, même si la galette est parsemée d’excellents refrains ("Vianna","The Silver Sister"), il arrive que la plupart d’entre eux ne prennent simplement pas ("The Call of the Mountain", bien trop pop pour être honnête). Ces défauts, malgré leur gravité relative, empêchent l’album de devenir un véritable coup de coeur et c’est bien dommage car il n’en est vraiment pas loin.
Au final, Eluveitie nous livrent ici un album de très bonne facture qui, s’il gagnerait à moins s’étendre (comme toujours), a au moins le mérite de livrer des compositions léchées, épiques et souvent efficaces en diable. Après, le manque de prise de risque du groupe pourra en décevoir plus d’un mais est-ce vraiment un mal ? Après tout, la recette de base est originale et permet au groupe un certain confort. J’aurais tendance à dire que tant que le public est content tout va bien, mais ce serait un peu facile. Alors, à quand un vrai rejet des limites ?