Et bien voilà ! Déjà! C'est la der'...Si seuls les habitué(e)s du fest le savent, pour beaucoup c'est le moment d'en profiter une dernière fois, car les jours qui vont suivre laisseront fatalement un petit gout amer, un espèce de jet lag clissonnais, un léger spleen de cette époque de l'année où tout est bien durant trois jours. Tout, sauf la température en journée et les mecs qui, à 6h du matin, gueulent pour la 666 666e fois "Merci qui? Merci Jacquie et Michel!" et "Philippe viens là que j'te bute!" (ah le cobra...). Aussi c'est le moment d'en profiter. En plus Black Sabbath est censé "clôturer" le festoche alors...Go!
Et on commence cash par un gros potentiel, à savoir les
Blues Pills (11h05, MS02) : les petits jeunes (seulement 2 EP à leur actif, l’album étant à venir courant juillet) débutent sur la Main Stage 1. Et vu le style pratiqué, un rock aux forts accents retro et blues, une place sous la Valley aurait été tout à fait à propos. Le public était déjà en nombre en cette heure matinale et semble avoir été conquis. On reparlera donc sûrement dans le futur de ce groupe ultra prometteur, emmené par une chanteuse très talentueuse. Visuellement, le groupe ressemble à une photo de vos parents dans leur époque flowerpower, mais musicalement c'est vraiment cool. Tour à tour, les différentes scènes reprennent le rythme des concerts et coté Temple, on peut retrouver
Blacklodge (11h40, TEMPLE).
Malgré l'heure bien matinale où la chaleur fait déjà son travail, les français de Blacklodge et leur black indus vont lancer les hostilités et démarrer cette journée sous les meilleurs hospices. Avec un son plus que correct et une mise en scène à base de light-show rouge selon les règles de l'art, le public put largement les acclamer et reconnaître le bon set proposé. Les electro-satanistes ont ainsi pu rallier à leur cause les curieux découvrant le groupe. Une belle prestation malgré l'heure, avec un public quasi triplé entre le début et la fin de set. A découvrir ou redécouvrir en d'autres lieux.
Au même moment ce sont les
Scorpion Child (11h40,MS02) qui préparent leur set. Groupe heavy blues aux forts relents psychédéliques formé en 2006,
Scorpion Child fait passer une demi-heure agréable sur la MS02 avec ses mid-tempos, certes pas ébouriffants d'originalité, mais impeccablement exécutés. Avec en prime un bon chanteur en totale dévotion à Robert Plant. La formation texane constitue donc un candidat parfait pour la Valley, mais celle-ci abrite
Satan's Satyrs sur le même créneau horaire. Le choix a dû être difficile pour les stoners matinaux (mais comme chacun sait, les stoners sont rarement matinaux, le matin c'est plutôt l'heure à laquelle ils se couchent).
Déboule alors l'instant que tout le monde attendait dans la joie à commencer par le groupe lui même, à savoir Lofofora (12h15 ,MS01). «
On est les Lofofo et on vient pour l'apéro ! » hurle Reuno en conclusion du premier titre joué par
Lofofora sur la Mainstage n°1 vers midi et quart. Un apéro bien frappé, voire carrément secoué pour tout dire, une partie du public ne se faisant pas prier pour entamer les deux circle pits ayant probablement soulevé le plus de poussière durant ce Hellfest, et pourtant la concurrence était rude ! Doublant couplets et refrains sur les chansons les plus anciennes, le tube "L’œuf" en tête, l'assistance a plus de peine à distinguer les paroles de "L'innocence", "Pornolitique" et "Tsarine", trois titres du prochain album dont la sortie est prévue à la rentrée. Saluons le choix osé des Frenchies qui auront casé plus de nouveautés en une demi-heure que les trois-quarts des groupes en trois jours de festoche. Dommage que le chant soit un peu étouffé par les autres zicos, très bons au demeurant. Un set court, à l'énergie punk, qui a poussé un gamin de dix ans à slammer deux fois – que fait la DDASS ?
Avec bien moins de monde, on pouvait en parallèle découvrir le groupe
Obliteration (12h15, Altar) du coté de l'Altar. (report
ici)
Et si on était vraiment chaud, ce qui a priori ne posait pas de problème vu le thermomètre complètement débile de cette ultime journée, on pouvait enchaîner directement avec
Ulcerate (13h35,Altar) et prendre une grosse claque de death ultra barré et alambiqué histoire de se rafraichir un peu. Le Hellfest étant l’occasion de découvrir de nouveaux groupes, pourquoi ne pas aller jeter un œil et une oreille à l'Altar et découvrir le groupe de death néo-zélandais plusieurs fois encensé dans vos pages préférées (ici, quoi!). Après les claques fournies par
Kronos et
Benighted à des horaires similaires, on était en droit de s’attendre à une prestation dans le même esprit. Et bien... pas du tout. Déjà parce que la musique proposée est infiniment plus alambiquée, complexe, variable dans ses tempos, et torturée. Moins pêchue et communicative, aussi. Et que le groupe est, en conséquence, autrement plus statique et concentré sur scène que les joyeux bourrins précités. Du coup le set est forcément un peu décevant quand on s’attendait à une nouvelle partition de brutal death. Non pas que
Ulcerate ce ne soit pas intéressant, loin s'en faut, mais le son ne met pas forcément en valeur une musique basée sur des riffs pas forcément évidents à assimiler et à différencier. L’absence de mélodie n’est pas forcément un atout non plus, même si l’on sent une musique extrêmement travaillée et qui passe sans doute mieux sur album. Un truc de fans et de spécialistes, en somme!
Puis vint
Dordeduh (14h20, Temple) pour ceux qui ne voulaient pas sortir de la spirale de la violence dominicale clissonaise. Et ce qui est bien, sous la tente Altar/Temple, c’est qu’en se tournant simplement à sa gauche ou à sa droite à la fin d’un concert (les deux scènes se faisant face), on passe dans un monde et une ambiance totalement différents. C’est encore plus notable quand on passe du death-metal massif et torturé de
Ulcerate au black metal roumain mystique et atmosphérique de
Dordeduh. Le contraste est saisissant. Le début du concert fait la part belle aux instruments traditionnels, au cours d’une longue intro mystérieuse, envoutante mais déroutante. Puis on retrouve la musique du groupe, très proche de
Negura Bunget dont plusieurs musiciens sont issus. Au programme, chant clair incantatoire alternant avec un chant agressif très maîtrisé, arpèges typiques du (des) groupe(s), au service d’un black metal prenant et immersif, alternant passages lents et accélérations renversantes. Une fois n’est pas coutume, le son est excellent, et rend hommage à la musique du groupe. Preuve en est que le black metal n’est pas qu’une musique de barbares brûleurs d’églises (cf
Enslaved et tant d'autres), ce que ces roumains ne sont très certainement pas.
Pendant qu'on se faisait plaisir sous les tentes, l'après midi est déjà là et casse la gueule de tous les malheureux restés postés aux mainstages :
Angra (16h,MS2)(live report
ici) joue donc devant un parterre un peu plus clairsemé car, fuir la chaleur devenant une question de survie, c'est sous le chapiteau de l'Altar que l'on vient quêter un peu d'hospitalité (et d'ombre). Cela tombe bien, les joviaux quadragénaires
d'Unleashed (16h55 – Altar ) entament leur prestation. Emmenés par l'inaltérable (et ventripotent) bassiste/chanteur Johnny Hedlund, le groupe allonge la liste des pionniers/vétérans venus se produire au Hellfest. Certes moins reconnus à l'international que
Black Sab', Deep Purple, Iron Maiden ou
Slayer, les Scandinaves appartiennent néanmoins au club restreint des musiciens qui ont (co)inventé un style, en l'occurrence le death metal suédois, avec l'aide des futurs membres de Dismember et d'Entombed. À la différence du dernier nommé qui s'est un peu paumé dans ses tentatives d'évolution (sauf si on est ouvert au monde du hardcore, auquel cas Wolverine Blues est une tuerie absolue),
Unleashed est resté fidèle à son «
viking » death metal, exaltant les vertus païennes et guerrières dans une brutalité de bon aloi. Ce que vont prouver Hedlund et ses sbires pendant les cinquante minutes qui leur sont allouées en alignant les morceaux de bravoure tels "Wir kapitulieren niemals", "Hammer Battalion" et "Death Metal Victory" – les choses sont claires, non ? Bien aidés par un son très correct et soutenus par une audience conquise, les Suédois démontrent qu'il faut encore compter sur eux, 25 ans après leurs débuts.
Coté MainStage c'est
Annihilator qui prend le relais (
report ici). Alors que du coté Valley on peut voir
House of the Broken Promises (17h50,Valley). Et ouais, toujours plus de bon gros hard-rock-stoner sous la Valley ! Cette fois-ci c’est le deuxième groupe du guitariste d‘
Unida qui se profile, dans un format nettement plus orienté heavy rock mélodique que son autre combo, programmé en clôture de fest sous la Valley ce soir-là. Et la recette fonctionne plutôt bien, avec un guitariste riffeur fou, à fonds dans son truc (on dirait clairement Nick Oliveri avec une six-cordes), un batteur carré de chez cubique et un bassiste-chanteur au timbre et aux lignes de chant vraiment cool, en dépit d’un charisme proche du zéro absolu (en gros on dirait Andy Mc Bride dans le clip de "Roadie" de
Tenacious D). Pas forcément le concert le plus mémorable du festival, mais indéniablement un bon moment passé à l’ombre de la Valley (l’ombre et la proximité d’un point d’eau, et de chiottes propres, ayant peut-être aidé à apprécier le moment).
Retour sur les scènes principales pour un "très bof" du festival à savoir
Dark Angel 1(8H50, MS01) :
remplaçant au pied levé
Megadeth qui a déclaré forfait officiellement en raison du décès du frère de son bassiste – ce qui n'a pas empêché la bande à Mustaine de se produire au Canada la veille du Hellfest (énorme foutage de gueule de ce gros redneck de Dave donc) –
Dark Angel se présente sur la MS01 avec l'aura flatteuse de pionniers du thrash metal qui envoient du lourd. L'interrogation est cependant de mise face à ces vétérans qui se sont récemment retrouvés après un hiatus de dix années et affichent seulement une poignée de concerts au compteur depuis le printemps. L'interrogation devient suspicieuse lorsque l'on connaît l'affection du groupe pour le son médiocre, y compris sur ses enregistrements studio. Dès les premières notes, ou plutôt les premières frappes surpuissantes du batteur dominant la bouillie sonore des guitares, les craintes sont validées. Revient alors en mémoire
le concert bourrin donné par Testament l'an passé au cours duquel se sera essentiellement fait entendre la batterie en mode blitzkrieg de Gene Hoglan qui fait ici son retour en 2014 avec la formation qui l'a révélé. Hellfest's Drums Master Class part II. Comme le répertoire de
Dark Angel est globalement moins affriolant que celui de
Testament, et son chanteur encore plus à la ramasse que Chuck Billy, il n'y a finalement pas grand chose d'intéressant à retenir de ces cinquante minutes brouillonnes au possible. En plus, les mecs ne jouent même plus "I don't care about you (fuck you)", la reprise du gang punk
Fear qui aurait pu leur assurer la participation du public. Next band, please.
Justement le groupe suivant se produit coté Temple et il s'agit de
Vreid (19h45, Temple) (
report ici) alors que sur la Mainstage la sensation s'appelle
Behemoth (19h50, MS2)(live report
ici). Ensuite c'est le moment de retrouver les expérimentés
Paradise Lost (20h40, Altar). Le groupe a majoritairement axé sa set list sur ses plus gros tubes. Ils ont assuré un show puissant, efficace et même parfois dansant grâce à l’apport de beats electro sur les titres de "One Second" et "Symbol of Life", assez inattendus mais très convaincants. Cerise sur le gâteau, Nick Holmes ne faisait pas la gueule et avait l’air content d’être là, haranguant la foule, et en se permettant quelques petites blagues.
En parallèle on pouvait également voir ou revoir (il n'est pas trop tard...quoique!) les
Misfits (20h45, Warzone) . Une heure, 30 titres, la Warzone : oui, les
Misfits jouent du punk. Un an après le passage à Clisson de Glenn Danzig, co-fondateur et compositeur de quasiment tous les titres de la première mouture de cette formation au destin tourmenté, c'est la version emmenée par Jerry Only – l'autre membre d'origine – qui vient dérouler son Punky Horror Show au milieu des plants de muscadet. Bien sûr, tout ce qui fait la renommée des Inadaptés est au rendez-vous : son crade, costumes crades et maquillages crades qui, il faut bien le reconnaître, confèrent à ce trio de quinquagénaires empâtés une allure un peu pathétique. La torpeur s'installe progressivement à l'écoute de cette enfilade de mini-morceaux desservis par un chant pas toujours concerné et un manque de conviction dans l'interprétation. En outre, les échanges avec l'assistance sont réduits à la portion congrue. Heureusement, certaines pépites font toujours leur petit effet - "Hybrid Moments", "Teenagers from Mars" (certains festivaliers portent le tee-shirt), "Attitude", "We are 138" ou encore " Helena" et, last but not least, le fameux "Die, Die my Darling" généreusement repris par
Metallica. En revanche, pas de "Last Caress", un autre titre des
Misfits enregistré par les Four Horsemen et c'est bien dommage. Un répertoire honnête, peu mis en valeur par des musiciens en pilotage automatique, un «
show » se réduisant à des maquillages de série Z : l'image des pionniers du horror punk des seventies en a pris un coup dans les canines ce dimanche soir.
Coté Mainstage,
Soundgarden (20h50, MS1) se pointe. Pour se produire entre
Behemoth et
Emperor il fallait forcément un groupe avec les boules bien accrochées. Et la puissance est venue du grunge !
Soundgarden a proposé un set puissant. Le groupe, pépère rock, se présente en professionnel avec une assez grosse affluence devant la MS1. Le beau Chris Cornell remercie même le public français d’avoir pourri son concert en Suisse lorsque l’équipe de football tricolores torpillait son voisin alpin durant la coupe du monde. La setlist est maline et propose rapidement le « black hole sun » de toute une génération et accroche le festivalier. A dire les musiciens montrent qu’il n’est pas nécessaire de se grimer ou d’en faire des tonnes pour assurer.Notons d'ailleurs le jeu de Cornell loin d'être facile tant le bonhomme joue juste et parvient à jouer des notes incroyables. De plus le groupe bénéficiera d’un début de coucher de soleil qui sublimera certains morceaux comme la doublette « My wave » et « The day I tried to live ». Bref un set pris comme une bonne dose de bien-être et qui s’ajoute au haut niveau des concerts donnés sur MS sur cette journée. (Entre ça et
Emperor dans l’autre registre une nouvelle preuve qu’un groupe seul sans artifice est capable de transporter son public uniquement avec la musique).
Ambiance magique avec
Sólstafir (21h50, Temple) qui revient après un dernier passage il y a deux ans où il n’avait bénéficié que d’un set restreint et d’une heure assez matinale. C’est beaucoup plus tard dans la journée cette fois-ci que les Islandais ont livré un concert qui a tranché par rapport au reste de la programmation de cette scène, tour à tour calme, posée, ou au contraire très intense, avec un public limite en transe. Les cow-boys du froid ont fait oublier à ceux présents qu’ils rataient un autre gros moment du fest qui se passait en même temps sur la Mainstage 2.
Pour patienter avant
Black Sabbath, il y avait deux options principales : se poster à la Mainstage 02 et se faire ramoner la race par les immenses
Emperor (live report
ici) qui jouaient sur la Mainstage 01 dans le même temps, ou aller se poser du côté de la Valley pour, une dernière fois (sauf pour les fans
d’Unida), groover un peu. Quelle ne fut pas ma joie de choisir cette seconde option après quelques minutes à supporter le pilonnage brillant mais intensif des potes d’
Ishahn, car le set de
Spirit Caravan (21h50, Valley)
fut tout bonnement génial : son absolument parfait, riffs plombés terriblement groovy et tranchants, parmi les meilleurs de tous ceux entendus ce week-end (et il y en eu plein), et un Wino (Monsieur Saint-Vitus, s’il vous plait) en grande forme. Ajoutez à cela un public bien content d’avoir vu ça malgré l’épuisement, et vous obtenez une belle réussite pour l’avant dernier concert de la Valley millésime 2014.
Flogging Molly ( 22h55, Warzone) a, pendant ce temps là, la lourde tâche de jouer en même temps que
Black Sabbath. Qu’à cela ne tienne, ça ne leur a pas empêché de blinder la Warzone ! Et à l’instar de Dropkick Murphys il y a quelques années, les Américains ont vraiment foutu le feu, communiqué leur joie par leur musique et fait danser le public pendant tout leur set, qui était d’une intensité rare. Coté Altar, à cet horaire ce sera le set de
Soilwork (report
ici).
Quand à la troisième tête d'affiche, évidemment, le site du festival est maintenant plein à craquer : (presque) tout le monde veut voir
Black Sabbath (23h10, MS01) (report
ici)....Et voilà, le festival est presque fini puisque deux groupes seulement restent à jouer. le premier c'est
Opeth (report
ici) sous la Altar et le deuxième c'est
Turbonegro (01h05, Warzone) .Dernier concert du Hellfest on le disait, déjà… heureusement, l’orga a su choisir un groupe résolument cool et festif pour clore les festivités ! C’est donc sur les coups d’une heure du matin que les sémillants suédois débarquent, sapés comme à leur habitude de leurs plus belles tenues marines. Leur fan-club est dans la place (les fameux Turbojungend, qui tiennent plus du zélote que du fan, mais du zélote sympa et bourré !) et de manière générale, la warzone est plutôt bien blindée pour ce qui sera une belle dernière heure de fun remplie de tubes punk rocks bas du front mais extrêmement efficaces et joués avec un savoir-faire indéniable et une bonne humeur communicative. Moi qui reste généralement de marbre devant ce genre de musique, je me suis bien marré et je pense que ce fut un constat général.
C
’est d’ailleurs un constat qu’on pourra appliquer à ces trois jours, qui furent vraiment marquants : organisation au sommet de son art (petit point noir cependant sur les points d’eaux et sur l’étroitesse du camping, devenue alarmante), foultitude de groupes cultes, temps magnifique, site superbe, bref cette 9e édition avait des allures de 10e et d’anniversaire. Espérons que la prochaine, qui fêtera vraiment les 10 ans du festival pour le coup, sera à la hauteur…Merci à l'année prochaine.