CHRONIQUE PAR ...
Flower King
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
12.5/20
LINE UP
-Greg Lake
(chant)
-Robert Fripp
(guitare+mellotron)
-Peter Giles
(basse)
-Keith Tippett
(piano)
-Mel Collins
(saxophone+flûte)
-Michael Giles
(batterie)
-Gordon Haskell
(chant sur "Cadence And Cascade")
TRACKLIST
1)Peace - A Beginning
2)Pictures Of A City (including 42nd At Treadmill)
3)Cadence And Cascade
4)In The Wake Of Poseidon (including Libra's Theme)
5)Peace - A Theme
6)Cat Food
7)The Devil's Triangle
a)Mesday Morn
b)Hand Of Sceiron
c)Garden Of Worm
8)Peace - An End
DISCOGRAPHIE
Moui… La première écoute de ce disque nous laisse dans le même état qu’après la découverte de sa pochette : titillé mais pas entièrement satisfait. Il y avait en effet fort à faire pour égaler l’impact du terrible premier album, et puisque nous sommes à cette toute fin des 60’s où il est inconcevable de se poser pour regarder en arrière, le Roi Pourpre va se presser pour publier sa seconde offrande… et commettre une redite.
Rétrospectivement, on s’étonne que la formation, pourtant si polymorphe et audacieuse pour les cinq années à venir, ait tant joué la sécurité sur In The Wake Of Poseidon. Les tournées incessantes et l’attention soutenue de la presse spécialisée ont certes pu déstabiliser ce groupe encore jeune et au line-up instable, mais il faut dire les choses clairement : la face A de l’album est un calque complet de la même face sur In The Court… La même intro inquiétante qui déboule sur le morceau furieux, qui laisse place à la ballade doucereuse pour enchaîner sur une complainte épique… et au sein de ces morceaux on retrouve les mêmes structures, les mêmes constructions que la fois précédente. Sans compter qu’évidemment "Pictures Of A City", "Cadence And Cascade" et la plage-titre sont inférieurs à leur modèle…
Le premier cité est pourtant le sommet du disque : Fripp restera pour toujours un maître de cruauté et de perfidie, et ce titre en est la preuve. La lenteur poisseuse des parties chantées forme un parfait contraste avec la section instrumentale démentielle, et encore une fois le final apocalyptique fiche une vraie claque. Mais l’ombre de "21st Schizoid Man" plane de part en part, et nous empêche d’être parfaitement comblés. D’autant plus que les deux compositions suivantes ne sont pas à la hauteur : "Cadence And Cascade", interprétée mollement par le nouveau venu Gordon Haskell, ne retrouve jamais la magie d’"I Talk To The Wind", et la plage titulaire évoque trop "Epitaph" pour convaincre, même si Greg Lake est une fois de plus en grande forme.
Alors reste la face B, qui se détourne des sentiers battus, mais souffle malgré tout le chaud et le froid. Dans la seconde catégorie on se coltine le pénible "Cat Food" qui se paie le luxe de repomper la ligne de basse de "Come Together", pour un titre qui se veut une farce pop barrée mais dont l’effet comique tombe à plat. Le seul mérite de ce morceau est d’introduire le pianiste fou Keith Tippett, dont l’influence sur King Crimson sera cruciale pour les deux albums à venir… Mais juste après ce faux pas le groupe repart en trombe avec le pavé "The Devil’s Triangle", longue variation sur le thème de Mars de Gustav Holst, qui avait été rodé depuis longtemps en concert. Cette version a le bon goût de tirer profit des avantages du studio pour se développer lentement, sournoisement, et privilégier la tension cacophonique à la furie pure et simple. C’est également la première fois que le groupe s’essaie sur disque à l’exercice du crescendo, qu’il s’empressera de parfaire jusqu’à aboutir aux merveilles de la période dorée 73-75. Mais si nous n’en sommes pas encore là avec ce triangle diabolique, la folie malsaine qui s’en dégage a déjà de quoi nous réjouir.
On a beau faire, In The Wake Of Poseidon n’a pas volé son statut de parent pauvre de In The Court… et si le caractère exceptionnel de cette première œuvre donne par la force des choses une copie plus qu’honorable, on préfèrera tout de même retourner au modèle. On ne leur en sera pas (trop) gré, la suite de leurs aventures – sans Greg Lake – aura vite fait de bousculer tous les blasés…