CHRONIQUE PAR ...
Flower King
Cette chronique a été importée depuis metal-immortel
Sa note :
13/20
LINE UP
-Jean Pierre Louveton
(chant+guitare)
-Lionel B. Guichard
(basse)
-Guillaume Fontaine
(claviers)
-Jean Baptiste Itier
(batterie)
TRACKLIST
1)Introduction à la Différence
2)Les Enfants Rois
3)Même Peau, Même Destin
4)L'Homme Idéal (1)
5)Reflets
6)Décadanse
7)Une Question De Prix
8)Une Question De Temps
9)L'Homme Idéal (2)
10)Les Visages Du Monde
DISCOGRAPHIE
Nemo -
Si (Partie 2) : L'Homme Idéal
Il y a quelques temps de cela, j’avais songé à quelque chose d’assez troublant : au vu des progrès effectués dans le domaine de la génétique et la connaissance du génome humain, dans un futur plus ou moins lointain, la procréation pourrait prendre une tournure bien différente de ce que l’on connaît. À savoir : on installerait les couples désireux d’avoir une progéniture devant un écran géant, et de là, les tourtereaux modèleraient l’enfant de leurs rêves, y compris l’aspect physique : vous voulez un grand brun aux yeux verts pénétrants ? Pas de problème, on vous prépare l’embryon, choisissez ce que vous voulez, c’est libre service ! Délire ? Pas forcément, puisque les gens de Nemo se sont fait la même réflexion, et qu’elle est loin de les rassurer…
Achevons donc de planter le décor : avec Si Partie II : L’Homme Idéal, la formation hexagonale nous met face, une petite heure durant, aux dérives que pourrait entraîner l’avancement de la science : l’eugénisme, la recherche d’une perfection uniforme, autrement dit le refus de la différence. Des interrogations justes, qui n’ont pas encore été surexposées et qui ont le mérite d’être brillamment formulées dans ce recueil. Il y a là un refus du manichéisme et de l’alarmisme qui fait plaisir à entendre au royaume du camembert et des opinions tranchées dans le vif, parfois en dépit du bon sens. Le voyage vaut le coup rien que pour ce concept dense et fouillé, d’autant plus que le chanteur met du cœur et de l’énergie à nous le raconter. Sans être virtuose ou jouer l’expressionnisme, il sait se montrer convaincant.
Et musicalement ? On a affaire à un rock progressif assez musclé, mâtiné de longs développements instrumentaux qui rappellent de temps à autre le Pink Floyd de l’ère Animals, celui qui prenait plaisir à gamberger dans de longues jams bluesy. Nemo aime donc prendre son temps, et si cela serait pénible dans le cadre de compositions individuelles, ça passe mieux dans le cadre d’un concept-album où les titres s’enchaînent les uns aux autres. "Même Peau, Même Destin" et "Reflets", toutes deux avoisinant les dix minutes, flottent ainsi dans une atmosphère comateuse, offrant un contrepoids intéressant à des titres plus énergiques comme le speedé et excellent "Les Enfants Rois", ou l’instrumental "Décadanse" qui affiche clairement l’étiquette « prog » du groupe, finalement très discrète sur l’ensemble de l’album.
C’est au fond une conséquence logique du parallèle au Floyd : comme chez la bande à Waters, il ne faut pas venir chercher la virtuosité et la complexité casse-tête : Nemo est plus intéressé par développer une ambiance globale que pour multiplier les plans en 15/14 avec option shred. On n’y trouvera pas non plus, et c’est bien dommage, un sens fulgurant de la mélodie ou un don pour les arrangements subtils, et les facéties de ? aux claviers n’y suffiront pas. Une exception à la règle toutefois avec "Une Question De Prix", qui développe une série de thèmes mélodiques fragiles et touchants.
Pour le reste, l’audace est finalement plus textuelle que musicale, et si les 56 minutes de L’Homme Idéal passeront certainement très bien sur scène – quoique les longues pièces gagneront à être raccourcies dans un tel contexte – le manque de richesse sonore empêchera d’y revenir autant que le sujet, encore une fois, le mériterait.