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CHRONIQUE PAR ...

100
Merci foule fête
Cette chronique a été mise en ligne le 24 mars 2024
Sa note : 16/20

LINE UP

-Sabrina "Andromeda Anarchia" Penalva
(chant)

-Marie-Claude Fleury
(chœurs)

-Maude Theberge
(chœurs)

-Jeff Mott
(chœurs)

-Samuel Arseneau-Roy
(chœurs)

-Laurent Bellemare
(chœurs)

-Adda Kridler
(violon)

-Earl Maneein
(violon)

-Fung Chern Hwei
(alto)

-Jennifer DeVore
(violoncelle)

-Edward J. "Ed" RosenBerg III
(saxophone)

-Laurent David
(basse)

-Kenny Grohowski
(batterie)

TRACKLIST

1) Overture - Death & Transfiguration
2) Limbo - A Place with No Weather
3) Interlude - Arrival
4) Laudes Mortuorum & Roll Call of the Newly Dead
5) A Decision
6) The Ballad of María Elena
7) Arguments at the Gates of Death part 1 - You can't drag me through your gate
8) Interlude - Innocence
9) Arguments at the Gates of Death part 2 - You don't remember what flesh is
10) Song of the Countess
11) Interlude - Moments of Stillness
12) Arguments at the Gates of Death part 3 - The hypocrites of the light (Tutti)
13) My Corpse Your Dungeon
14) Interlude - Climax
15) Afterglow
16) Double Call - Laudes Mortuorum Reprise and Finale
17) Lullabye

DISCOGRAPHIE

La Suspendida (2024)




Oh mon Être Suprême forniquant, qu’est-ce que c’est que ça ?! « Un opéra jazz et metal pour voix de femme solo et chœurs ». Le premier du genre, précisent leurs auteurs. Therion version John Coltrane ? Absolument pas, nonobstant la présence d’un saxophone imposant. La Suspendida, telle est son nom, est une œuvre ambitieuse. Et diablement intrigante.

Présentons les protagonistes (si vous voulez savoir de quoi il en retourne musicalement sans passer par la case contexte, rendez-vous au paragraphe suivant). Le bassiste français Laurent David, qui a rejoint la formation de black metal baroque Folterkammer après l’album Die Lederpredigt paru en 2020, discute de la possibilité d’un projet mêlant art lyrique, jazz et metal avec la chanteuse du groupe, Andromeda Anarchia, qui avait fait une apparition sur l’EP Axiom (2018) du trio new-yorkais Kilter, formation principale de Laurent David, lui-même ayant joué sur l’album solo de la Suissesse, Darkmatters. Banco dit le Frenchie. Pour le sérieux de l’affaire, il faut un concept, et un livret. La mission est confiée à l’auteur William Berger, qui trouve l’inspiration dans un fait divers pour le moins dérangeant, survenu aux États-Unis au tournant des années quarante, dont il tire la trame suivante : Maria Elena, jeune femme décédée, résiste à l’appel du royaume des morts grâce à la semence inséminée par le faux médecin nécrophile qui s’était occupée d’elle après l’avoir reconnue suite à une prophétie reçue en rêve de sa grand-mère. L’histoire un chouïa glauque a été mise en musique par Kilter - Edward J. Rosenberg III au saxophone basse, Kenny Grohowski à la batterie (officiant par ailleurs chez Imperial Triumphant, groupe de black atypique dans lequel joue Zachary Ezrin, guitariste de Folterkammer) et Laurent David. Andromeda Anarchia, invitée sur les deux derniers albums d’Imperial Triumphant, joue le rôle de Maria-Elena tandis que le Growlers Choir de Montréal incarne les Portes de la Mort. Enfin, le quatuor à cordes Seven)Suns complète la troupe, fort de son savoir-faire en matière de musique contemporaine – à son actif, entre autres performances, une réinterprétation de One of Us Is the Killer de The Dillinger Escape Plan ainsi que des apparitions remarquables, sur Spirit Of Ecstasy d’Imperial Triumphant (2022) et sur le poignant None but a Pure Heart Can Sing de So Hideous, sorti sur le label Silent Pendulum Records qui publie La Suspendida. C’est Laurent David qui a produit l’album tandis qu’ Ed Rosenberg III, le saxophoniste, s’est occupé des arrangements, cruciaux pour la cohérence de l’œuvre. Un avant-goût sous la forme d’un EP intitulé The Suspended Woman, par Kilter sort fin 2023 avec la moitié des titres, certains écourtés, la plupart en version instrumentale, d’autres avec la participation d’Andromeda Anarchia, pendant que le collectif donne plusieurs représentations de La Suspendida, aux États-Unis et en Europe.
Les moyens sont conséquents, le dossier semble solide. Il l’est. Après une courte ouverture dominée par les violons énergiques et grinçants des Seven)Suns est jouée une note, tenue pendant près de cinq minutes, rappelant le prélude de L’Or du Rhin de Richard Wagner. Sauf qu’ici, point de violons virevoltants, pas d’univers érigé dans l’harmonie mais un monde d’éther, inquiétant, d’où émerge le chant théâtral d’une âme qui s’éveille dans la douleur. Aucune percussion pour donner un quelconque repère, juste la voix, les cordes et le saxophone qui progressent dans un langage atonal, loin, très loin des badaboumeries habituelles du metal symphonique. Il n’y a pas de guitare non plus. Pour qui n’est pas familiarisé avec le dodécaphonisme viennois - Wozzeck d'Alban Berg est une influence revendiquée - la matière demandera peut-être un temps d’adaptation. Ici, pas de refrain, ni de couplet, pas plus que d’arias à la Verdi à siffler sous la douche. Juste des séquences qui se succèdent, tantôt abruptement, tantôt avec fluidité, sans retour en arrière possible, à l’exception d’une nouvelle tenue insistante sur "Afterglow" et de la reprise des première mesures de "Laudes Mortuorum Roll Call Of The Newly", développées jusqu’à l’étourdissement sur le consistant "Dead Double Call - Laudes Mortuarum Reprise And Finale", l'avant-dernière piste comme son libellé ne l'indique pas.
Les instrumentistes donnent corps, si l’on peut dire, à ce sinistre conte métaphysique, alternant attaques furieuses et accalmies intranquilles, avec une habileté de professionnels (et pour cause). Les sonorités rock et metal se fondent dans la masse, éléments de fabrication d’un agrégat sonore rude, et sombre. Certains passages dominés par la basse et les violons menaçants rappellent le Köhntarkösz version Hhaï de Magma ("Interlude – Arrival"), d’autres le "De Futura" du groupe de Christian Vander. Le saxophone basse en particulier apporte une touche dense, granuleuse, renforcée par les growls des choristes mais aussi ceux d’Andromeda Anarchia. La vocaliste à l’origine du projet, même si elle n’a pas participé à l’écriture, déploie avec intensité l’étendue de ses multiples registres – chant lyrique (en anglais) faisant songer à Lulu (pas celle de Lars Ulrich et Lou Reed, mais de Berg, toujours), chant extrême, vocalises, onomatopées. Son incarnation du rôle principal, tour à tour fragile et agressif, est un tour de force technique, en dépit de certains accès de stridence, toutefois légitimés par les affres que traverse son personnage tourmenté.


Servie par des interprètes de haut niveau, construite avec sérieux et talent, La Suspendida impressionne. Ancrée dans la musique classique contemporaine et les rythmes décalés du jazz, l’œuvre peut même intimider. Peu à peu, pourtant, elle révèle ses charmes vénéneux, sa noirceur à la fois élégante et surprenante. Growls et basses magmatiques balisent le terrain pour les amateurs de metal extrême, qui doivent se préparer toutefois à affronter un bloc fragmenté de quatre-vingt-trois minutes - les fans d’opéras wagnériens rigolent. Cependant, eux aussi risquent d’être surpris à l’écoute de cet objet singulier.





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