CHRONIQUE PAR ...
Arroway's
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
14.5/20
LINE UP
-Loïc Rossetti
(chant)
-Robin Staps
(guitare)
-Jonathan Nido
(guitare)
-Louis Jucker
(basse)
-Luc Hess
(batterie)
TRACKLIST
1)Shamayim
2)Firmament
3)The First Commandment of the Luminaries
4)Ptolemy Was Wrong
5)Metaphysics of the Hangman
6)Catharsis of a Heretic
7)Swallowed by the Earth
8)Epiphany
9)The Origin of Species
10)The Origin of God
DISCOGRAPHIE
Heliocentric est le premier volet d'une série de deux albums enregistrés par The Ocean à sortir en 2010. The Ocean dont le line-up insaisissable semble s'être fixé pour un temps autour de cinq musiciens, n'excluant pas pour autant une pléthore d'invités. A la suite d'un Precambrian au nom évocateur, le collectif continue sur une lancée métaphysique et axe son sujet sur les respectivement première et seconde blessures narcissiques de l'homme: l'héliocentrisme et la théorie darwinienne de l'évolution.
Annonçons d'emblée la couleur: Heliocentric aurait pu être un bon, voire même très bon album de post-hardcore mélodique. On retrouve les atmosphères planantes affectionnées par le genre, avec les sonorités belles, graves et torturées sur "The Origin Of Species", les envois plus écorchés sur "Swallowed By The Earth", les riffs mouvants de "Firmament". Loïc Rossetti, nouveau venu au chant principal, privilégie nettement les lignes claires. Avec sa voix chaude parfaitement maitrisée, Rossetti alterne sans surprise mais sans encombre chant hurlé et chant mélodique et amène même une touche un peu plus groovy sur "Metaphysics Of The Hangman" et "Catharsis Of A Heretic" – ce qui, ambiance tamisée et arrangements de cuivres aidant, fait étonnamment penser à du Charlie Winston. La présence d'une majorité de morceaux calmes écarte Heliocentric du pur hardcore: outre l'introduction atmosphérique de rigueur "Shamayim", on peut compter trois morceaux proches de la ballade. Viennent ensuite les couplets clairs de "The First Commandement Of The Luminaries" ou ceux légèrement jazzy sur un duo batterie/basse de "Metaphysics Of The Hangman". Rajoutez enfin un goût prononcé pour les accompagnements de cordes et de cuivres, piano compris. La base première de la musique s'en tient aux sonorités traditionnelles même si elle garde quelque peu en retrait la violence qu'elle pourrait contenir, lâchée presqu'exclusivement dans des hurlements braillés périodiques. Mais The Ocean se démarque sensiblement par une certaine originalité grâce à des changements de couleurs que l'on n'attendait pas, à l'union de mélodies immédiates suivant une structure hardcore et d'un orchestre de chambre.
Malheureusement tout cela ne suffit pas. Ce n'est pas que Heliocentric ne tienne pas ses promesses mais on ressent dès les premiers titres comme un manque de consistance qui ne nous permet pas de trop en espérer. The Ocean bascule un peu trop régulièrement dans certaines facilités mélodiques: ainsi des intervalles tout trouvés au piano de "Epiphany" ou du couplet de "Swallowed by the Earth" rappelant irrésistiblement certains standards rock à la Staind. Plusieurs titres dont le mièvre "Epiphany" et le très théâtral "Ptolemy Was Wrong" sont d'un niveau nettement plus faible que ce que l'on pouvait attendre. La progression dramatique mais marquée avec trop d'emphase de ce dernier titre tant au chant qu'au piano apparait d'autant plus déplacée que l'on sent comme une incohérence entre le ton employé et les paroles déclamées: « I can't tell you how I feel, I do not longer believe […] the Earth must revolve 'round the Sun but noone will believe me […]». De même que l'on pourra trouver convenu de répéter ad libitum en hurlant sur fond de postcore apocalyptique « Who made your architect? Where does he come from? What is he made of? » sur "The Origin of God". Certes tout le monde n'accorde pas la même importance aux paroles et plus globalement au concept, mais la remarque appuie ici l'impression laissée par la musique elle-même, à savoir un manque de substance sous-jacent. Croisement de cours de philosophie des sciences et de critiques (peu originales) du christianisme, on ne s'attardera pas trop longtemps sur la progression conceptuelle de l'album qui dessert donc plus qu'elle ne magnifie la musique.
Le bilan concernant Heliocentric est donc mitigé: d'un côté des atmosphères et une prestation plutôt attrayantes, de l'autre des inconsistances au niveau des compositions qui en font un album légèrement irrégulier. Malgré un son et des procédés qui lui sont propres, The Ocean ne parvient pas à convaincre totalement: même si l'impression est globalement positive on ressort un peu déçu du voyage. Mais que ce constat ne vous décourage pas d'aller forger votre propre opinion car Heliocentric a de quoi, cela est certain, en satisfaire plus d'un.