CHRONIQUE PAR ...
Winter
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note :
8/20
LINE UP
-Al Jourgensen
(chant+guitare+claviers+programmation)
-Mike Scaccia
(guitare)
-Tommy Victor
(guitare)
-Tony Campos
(basse)
-Casey Orr
(basse)
TRACKLIST
1) Ghouldiggers
2) Double Tap
3) FreeFall
4) Kleptocracy
5) United Forces
6) 99 Percenter
7) Relapse
8) Weekend Warrior
9) Git Up Get Out 'N Vote
10) Bloodlust
DISCOGRAPHIE
« Comment ça je suis trop vieux pour jouer au foot ? » s’indigne le grand-père devant ses petits enfants. « Passez-moi le ballon et vous allez voir ! » Le vieux commence à partir en dribble avant de tenter un shoot et de finalement s’étaler de tout son long dans l’herbe. Et oui, on a l’âge que l’on a et mieux vaut l’assumer… Apparemment, les vétérans de Ministry ont fait comme le grand-père et ont cru qu’ils avaient la verve de leurs jeunes années. On peut parier qu’en concoctant Relapse, leur douzième album (le dixième de metal industriel, les deux premiers donnant dans l'électro-pop), Al Jourgensen avait l’intention d’en remontrer aux petits jeunes. Mais, même avec tout le respect que l’on doit à un groupe du statut de Ministry, pionnier mythique de la scène indus, il faut quand même se rendre à l’évidence : Relapse n’est pas un bon album.
L’analogie avec le grand-père se tient vraiment : les rockers industriels américains semblent jeter toutes leurs forces dans les premiers titres de l’album. Si "Ghouldiggers" ne casse pas trois pattes à un canard avec ses longs passages parlés sans grand intérêt (l’histoire du groupe qui essaye de contacter son manager sans succès, ça n’est pas follement captivant...), en revanche "FreeFall" et surtout "Double Tap" sont assez emballants. Sur ce dernier titre, la rythmique puissante fait décoller l'ensemble et on retrouve l’espace de quelques minutes le côté implacable de Psalm 69. A partir de là, le déclin est amorcé. Si "Kleptocracy" retient à peu près l’attention grâce à son refrain, si la reprise à l’intérêt discutable de "United Forces" des moshers de S.O.D. est acceptable en faisant preuve d’indulgence, le reste de l’album est carrément pauvre. Ministry n’a jamais brillé pour ses compositions complexes, mais là c’est vraiment le summum. "99 Percenters", par exemple, n’est qu’une seule idée répétée de manière mécanique, et le morceau qui porte le nom de l’album est du même tonneau.
Toute l’énergie du début de l’album a disparu et on se retrouve à écouter quelque chose qui est à la musique ce que le jus de betterave est au sang. Les titres manquent de puissance et Ministry multiplie les passages parlés sans intérêt. Des chansons comme "Weekend Warrior" (au vague relent glam-rock) ou "Git Up Get Out ‘N Vote" et son refrain vraiment médiocre, sont carrément indignes du groupe. Sur le dernier titre, "Bloodlust", le groupe s’essaye même à un surprenant mélange entre hard-rock presque bluesy et refrain plus synthétique (on pourrait même croire à une reprise, mais il n'en est rien). Si le reste de l’album avait été décent, on aurait pu applaudir une telle initiative, mais vu la pauvreté de la prestation proposée, cet innovation fait presque sourire de dépit : si les fondamentaux ne sont pas assurés, à quoi bon ce genre de frivolité ? Pour les plus vieux suiveurs du groupe, on ajoutera également que le manque de nerfs de l’album ne le rend pas pour autant comparable à With Sympathy et Twitch, dont l’électro-pop était élaboré avec plus d'enthousiasme et de fraîcheur.
Né dans les années 1980, Ministry fait partie du cercle relativement fermé des dinosaures du rock, et, comme un certain nombre de ses collègues au grand âge, le groupe s’est essoufflé. Après un début honnête, Relapse se révèle être fade, édulcoré et parfois à la limite de l’auto-parodie. Si quelques chansons tiennent la route, le reste oscille entre moyen et très mauvais. L’album ne rivalise à aucun moment ni avec les productions des petits jeunes aux dents longues, ni avec les mythiques The Mind Is a Terrible Thing To Taste ou Psalm 69. Le combo s’était arrêté en 2008 avant de se reformer l’année dernière. Relapse ne semble hélas pas avoir bénéficié du coup de fouet que peut procurer ce genre de pause. Dommage.