Depuis son retour, et surtout depuis la sortie de The Dominion Gate, Nightmare n'en finit plus de s'affirmer comme un des fers de lance du power metal. A l'heure où la plupart des groupes semblent frappés par la même inconstance qui les empêche d'enchaîner les bons albums, il est bon de voir qu'il existe encore des valeurs sûres. A chaque nouvel album, le seul enjeu est de savoir s'il sera bon comme Insurrection, très bon comme The Dominion Gate ou excellent comme Genetic Disorder. Pour The Burden of God, ce sera la solution médiane.
Cela fait déjà une douzaine d'années que Nightmare s'est reformé, et comme tout vétéran qui se respecte, les Grenoblois ont aujourd'hui leur propre recette, qu'ils ont affinée au fil des albums et déclinée à moult reprises. Hormis cette intro symphonique aux allures de B.O., agrémentée d'une narration un peu kitsch, le début de ce nouvel album n'est pas vraiment placé sous le signe de la surprise. On retrouve la formule habituelle du groupe, faite de couplets agressifs basés sur des riffs mastoc, suivie par des refrains plus aériens qui permettent au grand Jo Amore de placer ces envolées lyriques dont il a le secret. Un titre comme "Sunrise in Hell" n'a donc rien de surprenant, mais il constitue un excellent opener bien plus convaincant que son homologue "Eternal Winter", notamment grâce à un refrain aux petits oignons. On notera qu'après un Insurrection qui se voulait plus extrême, avec des riffs plus thrashy et des vocaux plus agressifs, Nightmare est revenu à un style un peu plus classique. Les amateurs de mélodie qui étaient restés un peu sur leur faim se régaleront avec "The Burden of God" ou "Crimson Empire", dont les refrains illuminent littéralement l'album.
Les bons titres ne manquent pas sur ce nouvel album. Après une remarquable intro très apaisante, "The Preacher" sort du lot de par l'ambiance sombre qui émane de son refrain, doté de magnifiques lignes de claviers. Dans la foulée, dans un registre plus calme et mélancolique "Shattered Hearts" enfonce le clou, là encore par son refrain mélodique sur lequel Jo Amore fait des merveilles. Après, ce qui fait que cet album n'est « que » très bon, c'est qu'il manque un peu de moments forts. On en compte vraiment qu'un seul : "The Dominion Gate (part III)". Alors là, attention, Nightmare sort l'artillerie lourde. Sur ce titre, Jo est accompagné par la puissante voix de Magalie Luyten, et même presque défié compte tenu des superbes lignes de chant des couplets où ils se renvoient la balle avec ardeur. Le prérefrain remplit parfaitement son office de rampe de lancement, et le refrain majestueux enfonce définitivement le clou. Seul l'exercice symphonique du milieu pourra laisser un peu dubitatif : non pas qu'il soit raté, loin de là, mais à la différence de "Fighting the Darkness" de Primal Fear, il n'est pas du tout intégré au morceau : à la fin, un petit silence et hop, on renchaîne directement sur le prérefrain.
Au bout de 9 titres sur 11, on se dit qu'on se dirige vers un album solide et sans trop de surprises… et c'est le moment que choisit Nightmare pour dégainer la carte mystère. Et là franchement, grand, grand respect à ces messieurs pour continuer d'avancer, quitte à déplaire à la frange la plus conservatrice de son public. La révolution commence avec "Final Outcome", qui vient taper du côté du rock / metal alternatif US, avec son étonnant gimmick de gratte et son refrain catchy avec des chœurs aériens pour le moins inhabituels de la part du groupe. Mais cet échauffement n'est qu'une broutille à côté de "Afterlife". Sur ce titre, Nightmare vient carrément fureter du côté du… neo metal ! Et oui, rien que ça ! Vous ne me croyez pas ? Alors d'après vous, d'où sont issus ces fameux riffs syncopés qui s'en tiennent à une rythmique sur deux notes de guitare sous-accordée ? Et ces lignes de chant à la Korn sur le refrain, parlées plus que chantées ? Pas idiots, Nightmare a composé ce titre à la manière d'Avenged Sevenfold, en brassant ces éléments avec d'autres issus du heavy traditionnel. Et franchement, ce petit coup de jeune est un véritable coup de maître, aussi réussi qu'inattendu. Une nouvelle fois, chapeau !
Peut-être un petit peu moins flamboyant que Genetic Disorder, The Burden of God n'en reste pas moins inspiré et terriblement solide. Fidèle à ses bonnes habitudes, Nightmare continue d'exploiter sa large palette de couleurs, d'où un album une nouvelle fois riche et varié. Cerise sur le gâteau, le groupe s'est même permis quelques petites nouveautés : vous en connaissez beaucoup des groupes qui continuent d'innover au bout de 8 albums (le premier qui répond St Anger prend une claque sur le museau) ? Alors bravo à eux, et ne tardez pas à découvrir ce nouveau trésor.