En 1992 dans le petit monde du metal, pas le moindre panda de la bande à Euronymous dans les environs, ou si peu. Surtout en Suède, où les Entombed et autres Dismember faisaient la loi, sans partage. Du coup, Marduk, un petit groupe qui avait eu le bon goût de sortir un an auparavant une démo poétiquement intitulée Fuck Me Jesus, avec une couverture tout aussi révélatrice du côté fleur bleue de ses membres, a décidé qu’il les singerait, mais un peu différemment. Une signature avec No Fashion Records plus tard, le premier album était prêt à exploser à la face du monde dans toute sa violence blasphématrice.
Bon, qu’on se le dise bien, le premier album de Marduk n’a rien à voir avec le black metal, ou alors si peu. Ultra court du haut de ses 29 minutes, dont une minute d’intro presque inutile, l’opus fait plutôt la part belle à un death metal légèrement assombri, avec tout de même quelques passages presque assimilables à ce que le groupe fera après. On croirait entendre Incantation par moments, comme sur les ralentissements de "The Black", avec ces passages ambiancés assez funestes, et plutôt malsains. "Dark Endless" aussi cherche à poser une atmosphère, de par ses riffs qui restent dans la droite lignée de l’intro en son clair. Le chant est à mi-chemin entre le black et le death ici : une espèce de growl criard, qui rappellera les premières productions d’Unleashed ou Dismember. La batterie, assez frénétique par moment, préfigure assez bien ce qui nous tombera un peu plus tard dessus avec Hellammer et De Mysteriis Dom Sathanas. La production est assez atypique en revanche : nulle trace du son crayeux habituel du death suédois, mais plutôt un son relativement puissant qui permet de distinguer légèrement la basse, malgré la batterie sur laquelle on a mis trop d’écho.
La durée réduite et le nombre de morceaux donne un avant-goût sur ce qui va venir : du court, du direct, du frontal. Marduk violente correctement les oreilles avec son proto-black fortement teinté de death. "Still Fucking Dead" est un excellent titre d’ouverture, brutal à souhait et constitué d’une suite de riffs qui feront secouer la nuque même à des exigeants en matière de death, et le reste n'est pas trop mal derrière, avec principalement "Within The Abyss" ou "The Funeral Seemed To Be Endless". Tout ce qui part frénétiquement en fait, puisque c’est dans ce registre qu’ils se débrouillent le mieux. Pas de trace du moindre solo en revanche, malgré la présence de claviers sur "Still Fucking Dead" ou "Departure From The Mortals" (quel sacrilège, ce n’est pas trve du tout, comme chacun ici le sait). On notera également, sans que ce soit bien étonnant, des titres plus faibles, comme "The Sun Turns Black As Night", qui fait retomber un peu ce qu’avait bien lancé le premier titre. On y distingue néanmoins ce que sera plus tard Marduk avec ce break à 2:25, qui possède un riff typiquement black, doublé d’une rafale de blast.
Bien que correctement produit, le premier opus de Marduk est encore trop engoncé dans le death metal pour intéresser les amateurs de l’art noir, et en plus y’a du clavier et du son clair, donc pas trve. En revanche, il pourra rassasier tout deathster à la recherche d’un album court mais intense et sombre. Parce que le death ne va pas si mal que ça au teint de ces jeunes loups en fait. Ce premier essai studio est trop court et ne comporte pas de réel titre que l’on pourrait hisser au panthéon du genre, mais il constitue un petit défouloir agréable pour vieux briscards en manque.