Jour
4
:19 juin 2022
En cette dernière matinée de semaine une, la traditionnelle promenade du dimanche permet d'appréhender le site avec - en général - moins de monde que les deux premiers jours. Sauf… Qu’il fait bon. l’épisode caniculaire est passé, certes il y a du soleil mais celui qui réchauffe sans brûler et donne de belles lumières sans éblouir. On peut ainsi flâner malgré le monde plus important que d'habitude pour un dimanche matin sur le site de la Warzone et apprécier enfin la nouvelle statue de Lemmy, la précédente étant devenue trop dangereuse est ainsi remplacée. L’inauguration a eu lieu la veille en présence de Mikkey Dee et Phil Campbell. L’entrée du bosquet se dote aussi d’une nouvelle œuvre massive et splendide et participe d’année en année à l’enrichissement du lieu qui reste visitable hors festival. Ben Barbaud et le Hellfest annonceront d’ailleurs leurs nouveaux projets d’aménagement du site en collaboration avec les Machines de l’Île à Nantes.
DYSCARNATE (Altar - 11h30)
Puisqu’arrivé bien trop tard pour le set de Exocrine, c’est bien placé que l’on se prépare pour les Anglais de Dyscarnate et recevoir plein sourire le death rodée du combo. Et depuis la sortie de
With All Their Might (en 2017 déjà !), le set faisait partie de ceux qu’on avait l'impatience de voir dans la très longue liste des groupes annoncés. Et c’est la quasi totalité de la setlist qui s'articule autour de l’album (à l'exception de "The Promethean" issu de
And So It Came to Pass (2012). Quelle technicité ! Le trio monte en puissance rapidement au bout de quelques mesures et donne le ton des courts quarts d’heure à suivre. Sans aucune fioriture et grâce au son équilibré des Britanniques, le dimanche matin débute de la plus belle des façons. À se demander quand le groupe proposera du nouveau matériel et s’il se décidera/ pourra tourner et distribuer sa bonne parole. Une formation que l’on voulait découvrir. C’est fait ! Et devient maintenant un groupe à suivre pour qui on espère le meilleur.
KONTRUST (MS1 - 11h45)
Hop ! On a juste le temps de filer devant la mainstage pour la leçon de danse fofolle. Il fait bien meilleur et ça devient vraiment agréable de se mouvoir dans le festival d’une scène à l’autre sans nécessairement souffrir à chaque pas. Ainsi donc deux salles deux ambiances ! Time to Tango et en short tyrolien s’il vous plaît ! Julia Ivanova la nouvelle chanteuse est attendue par les curieux qui suivent le groupe depuis plusieurs années mais n’ayant pas pu encore découvrir les prestations live. Sans surprise le concert sera énergique et joyeux emportant en quelques titres ("
Dance", "1K1") la fosse entière sur la partie pavée de la mainstage. Le melting pot changé du groupe est efficace et tout le monde s’agite jusqu’au pétage de plombs et secouage en règle de popotins avec "
Hey DJ!" et forcément un "Bomba" de clôture qui génère applaudissements et gueulardises en tout genre. La musique festive, sur la MS ou sur la Temple, reste à chaque fois systématiquement efficace au Hellfest.
INGESTED (Altar - 12h45)
Le groupe est en fin de tournée, enchaînant les dates rapprochées depuis le mois de mai. Pourtant le groupe propose un set tonique et Jay Evans aura le sourire quasiment tout le long du concert. Le deathcore anglais est parfait pour une transition matinée - après midi. Le pit est remonté comme un coucou et malgré les titres au tempo moins approprié pour la «
bagarre », ça démarre immédiatement à chaque accélération. Les «
routiniers » "Skinned and Fucked", "Invidious" et "Better the dead" régalent l’assistance et rassurent sur la forme du groupe. Impeccable. direct. brut. L’ami slam du déjeuner, ce n’est pas la peine d’en rajouter.
C’est maintenant installé en grappes de headbangers que l’on passe l’après midi devant les mainstages , proche du merch artiste (il n’y a d’ailleurs que deux seuls endroits pour en disposer : dans Hellstreet et ici, près de la mainstage. Lorsque l’on voit les trois à quatre heures d'attente possibles pour les produits du festival on se dit que cette partie, comme depuis plusieurs éditions, peut être l’un des points d’amélioration. Ou alors c’est une des conditions propres au festival de Clisson
[ndlr : non]. Ainsi donc nous pourrons apprécier en succession les sets de
CAR BOMB (MS1 - 15h05) qui va proposer un gig improvisé. Le chanteur ayant manqué l'avion, le groupe se présente en mode instrumental. L’avantage du mathcore est de pouvoir proposer des titres sans chant. Malgré tout parfaitement agréable, forcément un peu longuet de facto on peut toutefois objectivement saluer la performance donnée au pied levé.
DORO (MS2 - 15h55) aura bien du mal à embarquer de son côté le public. L'anthologique chanteuse de Warlock ne jouera de toutes façons que du Warlock et ravira les trop peu nombreux fans ou connaisseurs du groupe. Un si peu repris "All we are" montre que le groupe fait partie d’une autre époque et d’une autre culture hard rock (le succès étant nettement plus conséquent en Allemagne). Quoiqu’il en soit, voir et entendre en vrai la metal queen Dorothee Pesch fait partie de ce que sait proposer le festival sur les grandes scènes en invitant de tels icônes de l’histoire du metal. Quoiqu’on en dise.
Et en parlant d'icône du metal arrive probablement le plus représentatif du moment avec le groupe ukrainien
JINJER (MS1 - 16h45). L’affreux contexte géo politique et la guerre en Ukraine génèrent quelques histoires humaines par l’intermédiaire de l’Art. En ce qui concerne le monde du metal, la bande de Tatiana est ainsi porteuse de message «
against war » et dénonce l’invasion ayant eu lieu quelques mois auparavant. Il faudra alors avoir de bons yeux pour voir le groupe évoluer. En effet les écrans ne diffuseront que de superbes animations façon Winamp Millenium ou iTunes 2. Pourquoi ? Aucune idée sur ce point, d’autant que le groupe prendra le temps d’une pause photo en fin de set. Quoiqu’il en soit, le collectif déroule les titres en piochant dans son entière discographie, le dernier album en date
Wallflowers (2021) étant privilégié. Le groupe prendra bien évidemment le temps de poser un discours sur le contexte de son pays et sur les pays en guerre en général. Longuement applaudi par le public.
RED FANG (Valley - 17h35)
La pause copains et le goûter devant les mainstages s'achèvent, on se retrouve dans la Valley pour le festival de slams et l’orgie de moshpit. Rendez-vous immanquable pour une bonne séance de cardio, le groupe déboule sous les ovations. Serrage de main au batteur, on s’accroche à son slip et c’est parti. De l’ouverture avec "
Blood Like Cream" jusqu’au terminal et traditionnel "Prehistoric Dog", le groupe enchaîne les titres devant une fosse hystérique qui ne lâchera rien jusqu’à la fin du set, on aura même droit à un très beau mur de la mort sur "
Wires". Ambiance bon enfant et gros bordel, les retrouvailles entre la section de Portland et le public sont fêtées dignement. On ressort avec la banane, trempé de sueur et de bière après cette bonne barre musicale. Grosse médaille à l’ingé son pour l'enrobage sonore : puissant, lourd et gras, irréprochable ! La bamboche est définitivement de retour !
MAXIMUM THE HORMONE (MS1 - 18H30)
Il est maintenant assez difficile de circuler entre les différents espaces du festival, a fortiori vers les mainstages. Encore une fois s’il y avait un top groupe à voir durant ce weekend 1, Maximum The Hormone arrive classé lorsque l’on constate à quel point la MS a gonflé en quelques quarts d’heure. Et on ne parle plus de curieux ou de personnes qui arrivent tranquillement pour les groupes de soirées et tête d’affiche mais véritablement de fosse compacte, excitée qui se presse pour voir ou revoir les Japonais. "Nigire!!" ouvre le set et c’est déjà l’explosion dans la fosse sur les cinquante premiers rangs. Quelle intensité ! (comprendre «
mais quel foutu bordel !!! »). En cinquante minutes le groupe nippon va donner autant qu’il recevra et réussit à dépasser la folie de l’univers musical qu’il propose. Passé les délirants "Maximum the Hormone II" et "I" , Daisuke Tsuda et Nao se succéderont et tenteront de discuter en anglais avec le public expliquant à quel point tourner en Europe et ici au Hellfest leur fait un bien fou. La situation sanitaire et les règles du spectacle au Japon sont nettement plus restrictives et retrouver un mosh pit d’avant la pandémie est compliqué pour eux. Le concert spectacle nu metal punk interactif enchaîne les pics de folie à chaque riff et refrain. Et l'ubuesque ""Chū Chū Lovely Muni Muni Mura Mura Purin Purin Boron Nururu Rero Rero"" finit de conquérir l’entier parterre des mainstages. Le set se termine par
un collégial "What's up, people?" et tout le Hellfest est définitivement séduit par les sourires, la débauche d’énergie et ce que vient de donner le groupe. Tout simplement unique ce weekend !
DOWN (MS2 - 19h25)
Du monde s’est amassé devant la mainstage n°2 pour assister au retour du meilleur superband du bayou, tandis que Jimmy Bower s’amuse à nous faire des doigts comme un sale gosse de cinquante piges depuis le côté de la scène. C’est un Philou pépère qui débarque sur scène, t-shirt
Black Sab vol. 4, short et mocassins, mâchant son chewing gum nonchalamment, comme un daron qui rentre à la maison, décontracté. Le jam entre vieux copains verra s'enchaîner les tubes : un traditionnel "
Lifer" dédié à
Dimebag et Vince, un "
Ghost along Along The Mississippi" ultra lourd, "Pillars Of Eternity" et "Eyes Of The South" célébrant la Louisiane et un final de plomb avec "Bury Me In Smoke". Un son incroyable,
bien gras et Anselmo en forme et en voix! Le bonhomme semble s’être refait une santé et ça lui va plutôt bien. De leur côté, Pepper et Kirk alternent les riffs et solos versions blues sludge bien poisseux des marécages. L’alchimie entre les vieux potes est totale, presque un peu trop en roue libre mais vu les années sur la route on ne peut pas vraiment leur en tenir rigueur. Ultra carré et communiant avec le public, le show est un moment de retrouvailles chaleureux, beaucoup trop court tant groupe et fans semblent heureux de se retrouver. À noter le troll de Phil demandant au public ce qu’il veut écouter, refusant automatiquement de jouer du Pantera avant que Pepper ne démarre un "Stone The Crow" magistral. Et les techos /crew qui montent sur scène prendre les instruments de chaque membre pour conclure "Bury
Me In Smoke" participe à ce côté «
familial » fort sympathique. On aurait bien échangé cette mainstage trop impersonnelle pour revivre ce concert au fin fond d’un bar crasseux de la Nouvelle Orléans sentant bon la bière chaude et le vaudou. “...and she’s buying a stair-f.cking-way to heaven” Mic drop. Papa a fini sa leçon.
DEVIN TOWNSEND (by request) (Altar - 21h35)
Ce dimanche soir, on ne sait très clairement plus où donner de la tête entre
Judas Priest, Perturbator et Devin Townsend. De la qualité partout, mais l’espoir résidait chez Devin Townsend affublé du suffixe «
By Request » qui fait résonner les espoirs les plus fous, c’est-à-dire surtout entendre du
Strapping Young Lad. Et le public ne s’y trompe pas en venant en masse voir le divin chauve ! L’Altar est pleine à craquer lorsque résonne les premières notes de “Failure” sous les light shows bleus et rouges. Classique donc mais efficace. Les riffs fonctionnent, le Canadien est particulièrement en voix, affichant un sourire radieux. Puis les choses sérieuses commencent avec l’inratable, mais ébouriffant "
Kingdom" prouvant une fois de
plus que Devin Townsend est absolument hallucinant en live. Le public reprend en chœur le refrain et headbangue tandis que les musiciens enchaînent sur "By Your Command" extrait de
Ziltoid The Omniscient. Et quel pied ! Le final tout en riffs bien puissant entame sérieusement les nuques des festivaliers. La violence peut alors être lâchée avec "Aftermath", oui vous lisez bien mesdames et messieurs, "
Aftermath" de Strapping Young Lad ! À ce moment-là, la folie, la brutalité s’empare des festivaliers, les guitares tronçonnent, Devin hurle comme un possédé et le light show rouge crée la parfaite ambiance pour ce déchaînement de violence ! Pause, donc discours de Devin globalement sur le fait qu’ici ce n’est que de l’amour qu’il y a entre lui et nous et aussi qu’il est profondément heureux de jouer ici après tout ce temps. Le taux de riff baisse alors un peu avec le lancinant, mais incroyablement prenant "
Regulator" que le public entonne à gorge déployée puis "Deadhead". Et là d’un coup les premières notes de "
Deep Peace" envahissent l’Altar, et bordel, qu’est-ce que c’est beau ! Le chant du Canadien est cristallin et le solo de guitare absolument imparable procurant de multiples frissons dans la fosse. Vraiment un moment suspendu, incroyable. Et si "March of the Poozer" qui suit est sympa, mais assez oubliable, Devin Townsend termine son set avec comme il le dit «
a different kind of love » et
balance l’un des tubes de Strapping Young Lad : "Love?". La fosse ne s’y trompe pas et se remet à headbanguer, le Canadien déchaîne une nouvelle fois des vagues de violences, des hurlements et des riffs sur scène pour le plus grand plaisir des nostalgiques de SYL. Ce «
by request » était attendu et même si certains auraient voulu plus de Strapping Young Lad, ce concert a bel bien tenu toutes ses promesses. Un grand moment de ce festival !
GOJIRA (MS1 - 23h15)
C’est la plaine des mainstages qui se retrouve totalement envahie par l’ensemble des festivaliers dès la seconde moitié du set de Judas Priest. Un flot continu de curieux se presse vers la mainstage 1, une heure avant le début du set. Tant et si bien que l’on se retrouve très vite serrés comme des sardines à plus de cinquante mètres de la scène. Changement de stratégie pour éviter une crise d’agoraphobie et me mettre à péter des genoux, j'échoue dans l’herbe derrière les bars devant écran géant pour profiter au maximum du son monolithique de nos fiers représentants tricolores. Gojira joue à domicile au Hellfest, c’est toujours un évènement et on en prend en général plein les cages à miel. Mais cette fois-ci je me suis endormi. Les albums récents m’ont laissé totalement indifférent, les gimmicks du groupe devenant trop récurrents et prévisibles. Le set sera évidemment, pour mon malheur, composé majoritairement de morceaux de
Fortitude et
Magma. On aura bien le droit à un lourd "
Backbone" salvateur et un culte "Flying Whales" mais les nouvelles compos font «
pschitt » pour certaines. Appréciation totalement subjective donc. Car niveau son, lights et performance les quatre vieux briscards sont au sommet de leur art, rien à redire là-dessus, ils en ont mis plein la poire aux milliers de fans présents. Mais les titres récents sont plats et c’est un Mario déchaîné et monstrueux derrière les fûts qui me semble porter le groupe désormais. Je propose donc un changement de nom pour le groupe : «
Mario Duplantier et les faire-valoir ». Car honnêtement je ne me suis pas emmerdé mais ça m’en a vraiment touché une sans faire bouger l’autre tout le long. Seule la batterie remuait en moi la petite flamme d’intérêt qui tentait de ne pas être soufflée. Je me demande si je ne suis pas le groupe depuis trop longtemps et j'ai fini par me lasser de la patte gojiresque. C’est propre, lisse, mais plus du tout efficace chez moi. Bref, ça manque cruellement de surprise, de danger, de metal en somme. Ce groupe restera à jamais dans mon cœur mais il est temps que nos chemins se séparent.
SICK OF IT ALL (Warzone - 00h50)
Décidé à se poser pour ce dernier concert en haut de la Warzone avec quelques collègues pour déguster une dernière bière avant la clôture et avec le son des Sick Of It All (qui déroule n’en doutons pas un set bourrin mais maîtrisé piochant dans leur longue discographie), on voit le feu d’artifice annulé la veille débuter derrière la scène des mythiques protagoniste de la NYHC. Les frères Koller ne devaient pas s’attendre à voir leurs titres et leur set soutenu par autant de pyrotechnie (ils en seront d’ailleurs surpris a priori par le son des explosions). Quoiqu’il en soit, pour le public, c’est parfait un "Wake the sleeping Dragon” ou un “Friends like You” soutenu par les fusées, à la fois surprenant et parfaitement associé. Une parfaite anecdote avec un idéal dernier set en Warzone. De longs applaudissements et remerciements ponctuent ce weekend de festival et il est l’heure de passer devant Lemmy pour un «
coucou à la semaine prochaine ».
Voilà ! C’est fait. Le festival du Hellfest et sa quinzième édition ont eu lieu. Le soleil a décidé de marquer de son empreinte (ou plutôt de ses brûlures) les deux premiers jours. On se rend compte que le jeudi devient également et finalement une quasi journée du festival. Une espère de « before » toujours extrêmement agréable et permettant à chacun de s’installer (camping, chez l'habitant ou autre) et se retrouver de temps de la soirée pour des premiers concerts, discussions et autre traditionnel « apéroooo ». La nouvelle organisation visant à totalement vider le centre de Clisson et déporter sur deux parkings les festivaliers a souffert de plusieurs couacs les premiers jours. Comme sur les deux dernières éditions la capacité maximale atteinte montre ses limites sans les déplacements mais n’oublions pas l’essentiel. Cette première édition a tenu toutes ses promesses : que ce soit en mode découvertes ou pour des retrouvailles musicales, le Hellfest est bien rodé. La semaine 1 s'est déroulée avec succès, souplesse, adaptabilité. Point de jet lag Hellfest pour plusieurs milliers de chanceux disposant d’un pass semaine 2. Clisson et la région se transforment alors en semaine à forte présence touristique sur les jours suivants. Une autre histoire...
Crédit photos : Un grand merci à Lucie Malfait (Facebook - Instagram) pour les photos illustrant cet article