CHRONIQUE PAR ...

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Merci foule fête
le 18 décembre 2018




SETLIST

Zeal & Ardor:

Sacrilegium I
In Ashes
Servants
Come On Down
Blood in the River
Row Row
You Ain't Coming Back
We Never Fall
Waste
Fire of Motion(s)
Ship on Fire
Stranger Fruit
Cut Me
Gravedigger's Chant
Children's Summon
Built on Ashes
We Can't Be Found

"Lass die Bühne":
Don't You Dare
Devil Is Fine
Baphomet

Hangman's Chair:

Banlieue triste
Naive
Sleep Juice
04 09 16
Give & Take
Dripping Low
Cut Up Kids
Full Ashtray

AFFILIÉ

Zeal and Ardor
Lille - Aéronef
(24 mai 2022)
Paris - Glaz'art
(19 avril 2017)

Hangman's Chair
Dunkerque - 4 Ecluses
(15 mai 2019)
Strasbourg - La Laiterie
(20 avril 2022)

13 décembre 2018 - Strasbourg - La Laiterie


Zeal_and_Ardor_-_Hangman's_Chair_Strasbourg_-_La_Laiterie_20181213

Il était pratiquement acquis que ce concert ne se tiendrait pas. En ce 13 décembre 2018. Deux jours après la tuerie. L'organisation de la Laiterie a été contrainte d'annuler Audrey Horne la veille, tandis que le rappeur Médine avait annoncé qu'il renonçait à faire le déplacement le lendemain. Et puis, en début d'après-midi, Zeal & Ardor publie un communiqué: « Le concert ce soir à Strasbourg est maintenu. L'incident survenu est une tragédie dans tous les sens du terme. Nous pensons qu'il est important de ne pas céder et de ne laisser aucune place, renommée ou traitement de faveur aux actes de terrorisme. Ce serait une victoire pour eux et nous ne l'accepterions tout simplement pas. À ce soir ».

Ce soir, nous sommes là. Devant la salle emblématique des musiques modernes de Strasbourg, coincée contre le remblai d'une bretelle d'autoroute, point de jonction entre le centre-ville historique et les faubourgs intra-muros. Le lieu n'aura pas été clos bien longtemps. Bravant le froid qui commence enfin à se faire sentir à l'approche du solstice, une maigre cohorte de futurs spectateurs – peu de dames pour l'instant – attend patiemment que le signal de l'ouverture des portes soit donné. Fouilles et contrôles ne diffèrent guère des pratiques antérieures. Le stand de merchandising est positionné à sa place habituelle et comme souvent, le personnel chargé de vérifier la validité des billets se débat vainement avec un matériel défaillant. Tout de même, l'assistance est franchement clairsemée... Certain(e)s auront peut-être renoncé ?

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Quoiqu'il en soit, cinq minutes avant l'heure dite, Hangman's Chair débute son set. Qu'il terminera strictement de la même manière : en assénant un inexorable stoner option sludge/ doom. La voix fluette de Cédric Toufouti apporte une once d'éclaircie à un ensemble dense, dominé par le son particulier de la guitare – transparente - de Julien Chanut, parfaitement dosée entre lourdeur et distorsion. Ne délivrant aucun discours ni explication à l'attention du public, les imposants Franciliens restent vissés à leur emplacement initial durant les quarante minutes de leur prestation – on n'en voudra évidemment pas au vigoureux batteur – attitude assez raccord avec la sélection très compacte, opérée au sein d'un répertoire faisant pourtant la part belle en studio à des échappées aériennes qui auraient sans doute permis à l'auditoire de prendre la tangente vers des horizons un peu plus excitants que celui de la grisaille dans laquelle baigne la « banlieue triste » évoquée sur le dernier album. Pour autant, le taf est fait et bien fait : la tranche de mortier mêlé de plomb aura été distribuée avec autorité.


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Durant la pause, le parterre se garnit copieusement, enrichi désormais d'une confortable proportion féminine dont une poignée d'éléments hispanophones, que l'on devine sous l'emprise de substances désinhibantes, contribue à enflammer l'atmosphère d'une manière aussi rude que désordonnée. Indubitablement, le collectif monté par Manuel Gagneux afin de donner corps à l'expérience Zeal & Ardor est attendu – en témoignent les nombreux membres de l'audience reprenant les paroles de la plupart des titres, dont certains, "We Never Fall" et "Cut Me", n'ont à ce jour fait l'objet d'aucun enregistrement. Sombrement vêtus, évoluant dans un décor dépourvu de tout artefact hormis le backdrop – lumineux – de rigueur, les six disciples brièvement encapuchonnés d'un culte satanique sans ostentation entonnent leurs gospels électriques. L'intensité avec laquelle ceux-ci seront interprétés durant quatre-vingt-dix minutes balaie les doutes de ceux qui craignaient que le concept initial d'un basculement du côté obscur de la foi de la part des descendants d'esclaves d'Amérique du Nord accouchât d'une incarnation bancale et superficielle. La coloration délibérément black metal du second LP Stranger Fruit est parfaitement retranscrite - les guitaristes trémolisent à tour de bras, ou plutôt de poignet, révélant d'ailleurs quelques faussetés sur les rares occurrences déliées.

 
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Une bassiste aussi discrète qu'efficace – parfois les clichés se vérifient – secondée d'un batteur irréprochable permettent à un Gagneux rapidement en nage de libérer une énergie impressionnante, que ce soit à la six-cordes ou au chant, deux micros étant mis à sa disposition afin d'alterner entre registre clair et vocalises démoniaques faisant songer aux éructations qu'Ihsahn délivre avec Emperor. L'absence de mise en scène est compensée par l'investissement non feint de l'élégant maître de cérémonie et de ses partenaires - mention spéciale au choriste filiforme, habité mais malheureusement peu audible, dont la dégaine adolescente contraste avec celle de son conséquent homologue et qui se secoue dans tous les sens à l'issue de chacune de ses interventions, à l'instar du second guitariste - sosie convaincant de Rick Rozz époque Leprosy. Rodé par une imposante tournée débutée il y a bientôt deux ans, l'orchestre fait preuve d'une cohésion qui lie des compositions présentant un canevas quasi-immuable – aux psalmodies relativement apaisées succède un déferlement furieux en guise de refrain – mais que des mélodies le plus souvent marquantes empêchent de tomber dans la monotonie. Proche de l'épuisement, Manuel Gagneux prend enfin la parole entre deux morceaux pour remercier les spectateurs, arborant un sourire partagé avec ses complices qui en dit long sur son contentement d'avoir pu mener aussi loin ce qui n'était, au départ, qu'un défi relevé devant son ordinateur dans l'anonymat d'une chambre new-yorkaise.


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Des vivats nourris, une « sortie de scène » donnant l'occasion notamment d'entendre une version légèrement revisitée du tube "Devil is fine", des remerciements, encore, et une émotion sincère de la part des musiciens d'avoir pu susciter autant de ferveur de l'autre côté de l'estrade. Ce soir-là, les Zeal & Ardor ont décidé de jouer. Et ils ont bien fait.


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