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CHRONIQUE PAR ...

98
Tabris
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note : 19/20

LINE UP

-Colin H. Van Eeckhout
(chant)

-Lennart Bossu
(guitare)

-Mathieu J. Vandekerckhove
(guitare)

-Levy Seynaeve
(basse)

-Bjorn J. Lebon
(batterie)

TRACKLIST

1) Children of the Eye
2) Edelkroone
3) Plus Près de Toi
4) Spijt
5) A Solitary Reign
6) Diaken

DISCOGRAPHIE

Mass IV (2008)
Mass V (2012)
Alive (2016)
Mass VI (2017)
A Flood of Light (2019)

Amenra - Mass VI
(2017) - postcore sludge - atmosphérique - introspectif - Label : Neurot Recordings



La musique est l'art premier. J'aime à utiliser le mot : « essence » pour appuyer mon assertion. Car lorsqu'on « l'entend », non point quand on se contente de « l'écouter », elle touche véritablement à l'essentiel. Et c'est ainsi que « j'entends » cet instant, par « essence », ces sonorités qui s'élèvent, cette clameur fantastique. Il n'est pas, pour la chroniqueuse que je suis, bonheur plus grand, que d'écrire maintenant, avec pour fin de juste tenter de délivrer et partager avec d'autres esprits émus de même manière, cette émotion si fulgurante qui est celle inspirée par le sublime Amenra.

La brume se lève à nouveau sur nos horizons communs. Lentement, mais sûrement, elle avance vers nous, encercle, et impose son joug magnifique. Dense, sans étouffer. Opaque, sans égarer. Éclatante.Certes douloureuse, mais cependant, oh combien libératoire. "Children of The Eye" est ainsi faite. Dès les premières notes, le « regard » que portent nos conduits auditifs sur la matière ne saurait s'égarer. A chaque seconde, le frisson rampe le long de la colonne vertébrale et se fraye un chemin vers la moelle. Nous reconnaissons l'appel de ces cordes qui font vibrer l'air. Nous savons déjà que nous n'allons pas nous détourner, pas une seule seconde. Fébriles, nous n'attendons déjà plus que l'instant où la première implosion va venir nous arracher au réel pour nous emporter au loin. Et cet instant vient. Dans un cri. Dans un déferlement. Dans une attente soulagée, comme une plaie laissée  à vif que l'on cautérise enfin. "Children of the Eye", comme des bras grands ouverts qui viennent nous happer dans cette torpeur « massianique » souveraine. D'abord, la froideur des riffs, la virulence du chant, la frappe tellurique, puis ces apaisements, cette profondeur, cet instant où l'on retient son souffle avant de sauter... autant de sillons familiers, creusés longuement, et dont la vue ouvre sur le bonheur torturé de qui se retrouve et se reconnaît dans un univers essentiel, non pas de noir composé, mais d'émotions impalpables, aussi laiteuses que le fog, aussi fuyantes que les songes et pourtant mises en lumière à chaque note, de manière viscérale, pour être saisies à pleine mains par nous, auditeurs avides. Oui, nous avançons ici en terre connue et aimée, et pourtant, à chaque pas, quelque chose se révèle à la perception sous un jour inédit. Ainsi le langage. Ou plutôt, les langages. Ainsi la voix. L'image également. Et tant encore d'éléments familiers et pourtant, inédits. L'emprunte reconnaissable entre toutes, la silhouette saisie au cœur même de la plus dense des fumées, mais dans le même temps, mille et unes finesses offertes qui nous font détailler ce visage connu avec une attention et un plaisir renouvelés.
"Plus près de Toi" s'ouvre sur le ton le plus acéré de l’entièreté de l'album, les cordes acides et la voix semblant se purger littéralement, déversant toute leur charge d'intensité, sur fond de frappe implacable, comme expression de cette sorte de rage sourde que seule la douleur peut conduire, jusqu'à un certain point où le pouls et le souffle ralentissent. La frappe dure cesse alors. Les cordes se font délicates. La voix, claire, se pare de désenchantement. Vous souvenez vous vos instants éprouvés et éprouvants de chagrin pur ? Et de la rage qui les a introduits ? Puis de ce raisonnement froid et implacable que vous vous forcez à tenir ? De la beauté encore de cette fatalité et toute la richesse émotionnelle que vous en avez retiré en quelques instants de mélancolique béatitude ? Et enfin, de l'explosion finale, du reflux, de la violence pure ? Ici en notes et en chant traduits, si superbement que vos muscles se tordront face aux retrouvailles que vous conduirez avec cette sensation totalement impossible à réprimer : « Je cherche quelque chose. Je cherche partout. Et dans mon cœur, j'emporterai la désespérance »... Comment le décrire avec justesse ? Écoutez. Écoutez donc. Si votre corps ne se meurt pas de convulsions, en cet instant, à l'intérieur, vous sentirez le bouillonnement conduit par la musique monter et brûler jusqu'au tréfonds de vos entrailles. Alors... des mots... et puis, "Spitj". L'instrumental regret. Vous n'aurez qu'à peine deux minutes pour l'éprouver. Mais il sera cinglant. Vous ressentirez cette vague monter vivement en vous, vous saisir la gorge, tourbillonner, puis elle vous laissera là. Pantois. Et vous ne saurez que faire.  Alors, elle viendra vous cueillir... car vous serez prêts... La plus belle entre toutes.  
"A Solitary Reign". Oh, je l'ai attendu, je l'ai guetté longtemps. Il me semble même l'avoir rêvé, une nuit. Ce mouvement. Ce riff introductif. Comme une beauté insaisissable. Je l'ai cru perdu dans les limbes. Il me poursuit depuis. Le chant se pose sur lui avec justesse et délicatesse. La gorge se noue. Le creux des reins se fend d'une nostalgie douloureuse. L'instant se savoure, les yeux fermés. Lentement. On voudrait qu'il dure, encore et encore, mais déjà l'urgence se fait ressentir... chaque seconde un peu plus... Et la clameur s'élève. Sublime. Violente dans ses attraits. Sans doute aucun, il s'agit là du titre le plus abouti, le plus riche, le plus puissant, de ce superbe album. Il surprend. Emporte. Saisit. Engloutit. La tête part en arrière. Les yeux se révulsent. L'envie de ne regarder plus que vers l'intérieur et de se couper totalement de la moindre source de vie extérieure tenaille, au sens propre. Car Amenra parvient ici à une intime et stupéfiante alchimie de quiétude et de rage dans un déploiement de lumière et de noirceur savamment entremêlées. L'équilibre est tout simplement parfait. Et exulter est la seule option possible..
Enfin, "Diaken". L'on ressent pleinement à son introduction le chemin parcouru par le groupe et par nous qui l'accompagnons. Car nous sommes à présent bel et bien sur le même fil tendu. Accords mineurs, non sans rappeler à nos mémoires l'intimité d'Alive, et Marteau de Tellure tombant progressivement sur nos esprits secoués, pour mieux nous happer dans un tourbillon farouche et parachever le tableau brossé sur nos esprits à vifs. Plongée au profond de nous même. Allez y, tête en avant. Sondez. Amenra est de retour pour envelopper et « réveiller », comme il l'a fait naguère, mais avec plus de force encore. Mass VI, la tant attendue, est enfin révélée. Et de sa douleur exprimée, je me sens renaître à la vie. A cette heure, passée la torpeur de chaque jour trivial, témoin de l'absurdité de chaque chose. L'écoute d'Amenra, c'est se saisir des maux à pleines mains, les engloutir pour en recracher le venin loin et puissamment dans un déploiement d'énergie intérieure fulgurante, et ressortir de l'expérience apaisé et éclairé, instruit d'une certaine façon, d'une chose enfin, enfin, sensée dans ce monde de fous où la création véritable se fait trop rare. De ce sens qui parcoure les veines, inonde l'esprit, allume la flamme et conduit à la révérence pour qui l'a injecté. Stupéfaite ? Oui, je le suis. Non du contenu de cet album, je l'attendais, tel qu'il a été crée et je n'ai à aucun instant craint la déception. Surprise je le suis uniquement de ma propre émotion à son écoute. De ce que cette musique emporte avec elle et de ce qu'elle nourrit à chaque nouvelle étape.


Où m’emporterez-vous à l'avenir, vous qui ne semblez que pouvoir avancer ? Que dis-je ? Fendre tout ? Je laisse la porte ouverte, car je reste avide d'instants encore plus accomplis, s'il se peut, je ne souhaite pas de fin à cette jouissance. Le mot catharsis n'a jamais eu de sens plus profond qu'en cette heure. Et je vous sais gré de m'avoir instruite de la définition de ce terme que je n'avais que lu, sans l'« entendre », jusqu'à cette heure de sublimation. Amenra, une fois encore, je salue votre œuvre avec émotion et respect. Votre unique défaut est de rendre le retour au silence trop difficile.

@ Glid de Breeze


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