Thy Mighty Contract, était déjà un premier album plus que prometteur. Seulement, après des débuts aussi forts, les jeunes musiciens de Rotting Christ pouvaient-il espérer faire aussi fort ? Cela pouvait être sujet au doute, puisque renouveler une seconde fois une inspiration aussi forte semblait difficile. D’autant plus qu’une seule année sépare Thy Mighty Contract de Non Serviam. Et pourtant…
Afin de briser directement la glace, et par là-même toute expectation qui aurait pu subsister, révélons directement que Non Serviam est un cran plus haut que Thy Mighty Contract. Sur absolument tous les aspects. Non Serviam offre plus de violence que son aîné, avec des phases blastées envoyées pied-au-plancher, et un chant toujours aussi râpeux, de quoi mettre du soufre dans ce nouveau concentré de mythologie. D’ailleurs "The Fifth Illusion", premier titre brillant, s’ouvre directement sur un bon passage à tabac de caisse-claire. Ensuite, revient l’élément qui rendait le précédent album si particulier : les très nombreuses mélodies. Comme la tendance générale du disque l’indique, un palier est encore franchi, et ces dernières deviennent obsédantes, à l’image de celles de "Wolfera The Jackal", une des pièces que l’on retiendra tout particulièrement dans leur vaste discographie, pour l’ambiance mystique qui y plane tout du long, toujours avec le clavier qui soutient les six-cordes dans leur tâche. Globalement, il se montre plus présent que précédemment, et la production qui a gagné en puissance, n’oublie pas de le montrer, de même que la basse, qui pouvait être difficile à entendre auparavant. A regretter tout de même que les toms de la batterie soient un peu en retrait, lorsqu’il s’agit d’autre chose que la caisse-claire ou la double grosse caisse.
Comme précisé en introduction, les amateurs de pita satanique trouveront très largement leur compte dans ce second album, puisque l’ambition a été revue à la hausse, avec un meilleur partage entre moments enlevés et ritualistes, dosage qui donne alors un black bien équilibré, modèle pour les jeunes norvégiens cavistes de l’époque. Le fait que l’album soit plus long, mais ne connaisse toujours pas de réelle baisse d’intérêt est aussi démonstrateur du gain de niveau, étonnant vu le matériel laissé derrière, mais tout de même constatable. Les enchaînements sont plus fluides et naturels, comme s’ils coulaient de source, une source prise au cœur du Mont Olympe, bien sûr. Les passages de bravoure, écoutés par les Trve une main sur le cœur, l’autre faisant les cornes, un signe de tête d’acquiescement allant avec, ne manquent pas. Le break de "Morality Of A Dark Age", les mélodies de "Memphesis Of Black Crystal"… Autant d’exemples parmi une multitude. Comme pour le précédent album, rien ici ne ressemble à ce que la formation ne fera plus tard, et Non Serviam contient donc du pur black metal, n’en déplaise aux puristes, qui, se rangent la plupart du temps à cet avis, d’ailleurs.
Un deuxième album un peu plus réussi que le précédent, sans que cela ôte à ce dernier sa qualité certaine. Un déploiement de riffs black bourré de leads sombres et envoûtantes, qui a tous pour satisfaire le parfait petit panda de 7 à 77 ans. Si ces deux premiers albums offrent un contraste important avec leur style actuel, qui essaye d’ailleurs régulièrement de repiocher dans ces deux temples de black depuis Khronos, ce n’est pas le moins du monde à leur désavantage, et ils comptent parmi les disques majeurs des Grecs.