Alors que Nightwish se trouve sur la pente ascendante depuis le début de sa carrière, les interrogations vont bon train peu de temps avant la sortie de Once, le cinquième album du groupe. Le précédent album Century Child semblait être une amorce d'évolution, grâce à l'apport d'un petit orchestre sur quelques titres et le remplacement remarqué du bassiste Sami par Marco Hietala, qui posa sa voix sur certaines chansons. Comment Tuomas allait-il rebondir après le succès de Century Child ?
L'apparition de l'orchestre philharmonique de Londres, dirigé par Pip Williams, est la grande surprise de cet album. Les précédents disques, sauf Angels Fall First, possèdent tous une composante symphonique que le groupe n'a jamais pu utiliser pleinement, faute de moyens. Sur Once, Tuomas explore cette composante plus en profondeur. Présent sur presque tous les titres, exceptions faites de "Dead Gardens" et "Romanticide", l'orchestre amplifie la musique et apporte aussi bien de la puissance ("Planet Hell") que de la douceur ("Kuolema Tekee Taiteilijan"). Exploité comme un instrument à part, il est complètement intégré aux compositions, comme par exemple sur "Higher Than Hope", une ballade qui gagne en puissance tout le long de ce titre, pour se terminer sur un final grandiloquent. Un second exemple flagrant de l'intégration de l'orchestre est le titre épique de l'album, "Ghost Love Score". Cela commence par une introduction dantesque, pour ensuite naviguer entres des passages plus calmes et d'autres où l'ensemble du groupe et l'orchestre se donnent à fond, soutenus par des choeurs de toute beauté, pour créer une musique qui ne déparerait pas dans une bande originale composée par Hans Zimmer, une influence flagrante pour ce disque.
Tuomas a intégré son amour des bandes originales épiques dans Once et cela s'entend, à commencer par les orchestrations du titre d'ouverture "Dark Chest of Wonders", avec son riff d'ouverture qui rappelle Pantera, une grande nouveauté pour le groupe. L'influence de Marco sur le jeu de guitare se faisait déjà sentir sur Century Child, et aussi bien Marco que Emppu sont très présents sur Once, entre passages proches du thrash sur "Romanticide" que le solo d'Emppu sur "Nemo", grande première pour le guitariste. Une évolution qui se prolongera sur le prochain opus, Dark Passion Play, laissant une place encore plus grande aux guitares. Les expérimentations variées sont de mise, aussi bien dans le jeu du groupe que dans les compositions. Puisant son inspiration musicale dans diverses sources, Tuomas a composé un album riche. Les chansons se suivent sans se ressembler, chacune ayant une signature bien particulière, entre le chant oriental et envoûtant de Tarja sur "The Siren", le duo violent Tarja/Marco (la prestation vocale du bassiste est impressionnante) sur "Planet Hell", le beat indus de "Wish I Had An Angel" ou encore la musique amérindienne sur "Creek's Mary Blood". Quasiment sans défaut, ce disque possède tout de même un point faible. Les compositions ne s'y prêtant pas, Tarja n'utilise plus son chant lyrique mais un chant plus pop, qui ne semble pas naturel pour sa voix et elle donne quelque fois l'impression de se forcer.
Once est, pour le moment, l'apogée du groupe. Plutôt que de se reposer sur ses acquis, le groupe prend des risques et signe une oeuvre surprenante et riche, qui explore de nouveaux territoires, sans jamais perdre son identité (la patte Nightwish est reconnaissable, aussi bien dans les orchestrations que dans le son, malgré la présence plus discrète du clavier de Tuomas). Utilisant toute la richesse que peut offrir un orchestre philharmonique, Once est devenu un album jalon du genre, la symbiose réussie entre musique symphonique et métal.