Voilà bien une formation, pour notre plus grand plaisir, qui se plaît à ne pas faire partie du moule, à ne pas appartenir aux poncifs du genre, à ne pas tomber dans le cliché... Cette formation qui, à force de travail et de qualité, a posé un pied sur le sommet. Et quelle preuve nous en a apporté ce fabuleux Epica, brulôt de metal symphonique d'une beauté rare. Alors 2 ans plus tard, que peut-il bien rester à dire à Kamelot? Bien des choses heureusement...
Car après toutes ces années, force est de reconnaître que l'on n'attendait pas forcément les américano-norvégiens à un tel niveau. En enchaînant les albums, bons certes, mais sans coups d'éclat, on aurait vite fait d'en faire l'éternelle première partie en concert. Mais voilà, après ce Epica, tout est différent. Il va falloir faire aussi bien, sinon mieux, afin de garder ce statut fraîchement acquis d'excellente surprise. Et beaucoup s'y sont cassé les dents. Alors ne prenons pas de risques et continuons dans la droite lignée de l'effort précédent, tel aurait pû être le discours adopté par Thomas Youngblood, leader de la formation. Et au regard du fait qu'il s'agit à nouveau d'un concept album avec ces mêmes interludes, on y croirait presque. Mais non. À la manière des plus grands, Kamelot a su faire succéder à une tuerie une autre tuerie. Un peu à la manière d'un Blind Guardian avec son A Night At The Opera, le combo nous offre ici la quintessence, l'oeuvre la plus aboutie d'une identité qui lui est propre.
Pour accomplir de tels desseins, il faut bien quelques surprises. La première est de taille, puisqu'un invité prestigieux fait son apparition en la personne de Shagrath de Dimmu Borgir. Oui, le chanteur de black. Ce n'est sûrement pas un hasard, il endosse ici le rôle de Mephisto (tiens donc), et ses quelques interventions, assez subtiles, apportent finalement une touche de finesse supplémentaire à un genre déjà bien évolué et finalement assez complexe. Car ce The Black Halo ne se laisse pas dompter aisément, et il faudra bien des écoutes pour en révéler toutes les qualités. Mais cela a l'avantage de rendre chaque nouvelle écoute attrayante, car on y découvrira sans cesse de nouvelles choses, et la pleine saveur de cette offrande se savourera à l'instar d'un bon vin : avec le temps. Avec une telle recette, rendre un titre de heavy speed intéressant semble finalement assez simple. Il suffit d'écouter par exemple ce "When The Lights Are Down", dont le riff de guitare se voit emporté par des envolées symphoniques dans un crescendo infernal sur un tempo du feu de dieu, le tout en 30 secondes chrono.
Et forcément, est-il besoin de le signaler, Khan est encore une fois impérial, magique, envoûtant, sombre, merveilleux de finesse... Les superlatifs manquent pour qualifier ce chanteur qui livre ici un sans faute, tout simplement. Alors, ne nous attardons pas une nouvelle fois sur ses nombreuses qualités et parlons plutôt musique. Pour notre plus grand plaisir, la variété est ici de mise. D'entrée, on a droit à un mid-tempo au rythme pachydermique, avec sa mélodie arabisante et ses temps martelés par le forcené derrière les fûts (Casey Grillo), répondant au doux nom de "March Of Mephisto". Se succèdent titres speeds passionants, ballades d'une beauté rares, mid-tempos aux refrains de qualité. Et tout cela s'élèvera encore d'un niveau le temps d'un "Memento Mori", titre fleuve de près de 9 minutes, chose à laquelle le combo ne nous avait pas forcément habitués. Si vous voulez présenter en un morceau toutes les qualités de Kamelot, ce morceau sera certainement un excellent choix. Difficile de rendre justice à ce titre tant celui-ci regorge de merveilles et passe par nombre d'ambiances différentes. Alors prenez simplement toutes les qualités qui ont pû être citées sur le groupe, rajoutez-en encore un petit peu en superlatifs, et vous aurez à peu près une idée.
Voilà pour ce The Black Halo, dont le seul défaut est finalement de ne pas avoir tous ses titres au niveau du meilleur de ceux-ci, à savoir celui que vous trouverez en piste 12. En tout cas, il s'agit bien une nouvelle fois, et même plus que jamais, d'une tuerie que nous livre là Kamelot. Que dire, si ce n'est d'en profiter, la suite, comme le prouvera Ghost Opera, ne pourra de toute façon pas être éternellement de cet acabit.