CHRONIQUE PAR ...
Crafty
Cette chronique a été importée depuis metal-immortel
Sa note :
13/20
LINE UP
-Trent Reznor
(chant+guitare+machines)
+ guests
TRACKLIST
1)Hyperpower!
2)The Beginning of the End
3)Survivalism
4)The Good Soldier
5)Vessel
6)Me, I’m Not
7)Capital G
8)My Violent Heart
9)The Warning
10)God Given
11)Meet Your Master
12)The Greater Good
13)The Great Destroyer
14)Another Version of the Truth
15)In This Twilight
16)Zero-Sum
DISCOGRAPHIE
Nine Inch Nails est Trent Reznor. Depuis le début, il s’est surtout bien entouré plus qu’il n’a formé un réel groupe, sa volonté d’indépendance étant très marquée, il n’y a rien d’étonnant à cela. La liberté est un sujet qui tient à cœur à ce bon vieux Trent. La liberté, et la musculation, mais on ne s’intéressera pas à cette dernière. Trent sait aussi comment faire parler de lui. Cette fois-ci, il y met le paquet : album conceptuel (ça, ça ne nous surprend pas vraiment), album d’anticipation (là aussi, on ne sursaute pas) et promotion par un jeu de pistes et de clés USB semées à droite à gauche lors de la tournée ayant précédé la sortie de Year Zero. Original, novateur, cet exemple sera certainement source d’inspiration à défaut de devenir un standard.
Mais plus qu’un simple album conceptuel, Year Zero est un message dont le prolongement se fait suite à l’acquisition de l’objet. Pas question d’épiloguer sur tout ce que l’on pourrait appeler le « paralbum », autant vous laisser le loisir de fouiller par vous-même. With Teeth en avait déçu plus d’un avec son air de nourriture aseptisée, loin des saveurs risquées d’un Downward Spiral. Peut-être devrait-on cesser de se la jouer fan nostalgique des débuts, après tout, ce n’est pas comme si NIN avait décidé de proposer des albums se fondant dans la masse. L’identité du groupe reste forte, une énergie palpable, une noirceur forte qui n’est pas sans rappeler les œuvres les plus sombres d’un David Bowie ou de Joy Division. Là où The Downward Spiral retraçait au microscope l’autodestruction d’un homme aux prises avec ses démons (un peu comme Reznor à l’époque), Year Zero passe au grand angle et à la machine à voyager dans le temps pour nous raconter une Amérique totalitaire et extrémiste, en 2022. Une civilisation qui s’autodétruit à cause de ses démons, précisément. Year Zero est synthétique, froid, glauque. Le tout a un son de machines qu’on aurait placé dans un usine gigantesque, à l’image de la rythmique, pratiquement toujours samplée, de même que les guitares qui se cachent sous une cohorte d’effets sonores en tout genre.
Le premier contact est délicat. Malgré un démarrage tout en puissante avec le bien nommé "Hyperpower !" et l’excellent "The Beginning of the End", le premier single "Survivalism" ne se laisse pas adopter si facilement. Le coup est quand même bien joué, parmi les premiers morceaux à avoir filtré, il a donc été moins choquant pour une parti des auditeurs à la première écoute du disque, car il renferme un des meilleurs refrains que NIN a eu l’occasion de créer durant la dernière dizaine et une énergie si caractéristique de Reznor. Les fluctuations électro-pop des titres suivants varient fortement, allant du dancefloor d’un "God Given" au groove d’un "Captain G" (rare titre où Josh Freese peut s’exercer derrière les fûts) et "Vessel" en passant par les vagues successives d’artifices électroniques de "My Violent Heart". Il est parfois difficile d’en retirer quelque chose de prime abord, certains titres se confondant, d’autres se démarquant trop du bloc. Certains en tireront un point faible là où d’autres crieront au génie. Le partage entre passages dansant et passages apocalyptiques trouve son paroxysme dans un "Meet Your Master" ou un "The Great Destroyer", démarrés de manière calme pour s’alourdir progressivement et étouffer un peu plus l’auditeur, tel le citoyen moyen de ce monde surveillé, emprisonné et oppressant.
De quoi contraster sévèrement avec le minimalisme de "Another Version of the Truth" et son piano lancinant, ou encore avec le refrain agréable de "In This Twilight" et la conclusion de l’album, "Zero-Sum", perle d’arrangements électroniques couplés au piano. Final magistral, mené par un discours moralisateur et inquiétant, il n’en reste pas moins un des meilleurs morceaux de l’album. Bidouillages et laptop en tout genre, Year Zero n’est pas metal, ni réellement électro, ni quoi que ce soit de précis en fin de compte. Il est certainement trop hétérogène, et pas forcément concis là où on l’espérait. Plus qu’un simple album, qu’une simple « quantité sonore », c’est avant tout une œuvre revendicatrice, proche d’un 1984 omniprésent depuis quelques années. C’est peut-être juste une œuvre en avance sur son temps, qui narre un futur dont on ne peut qu’espérer son improbabilité.