Edité 10 ans après le Plays Live, on peut dire que Secret World Live est historique à plus d'un titre : déja il marque le retour de Peter Gabriel sur scène, cela faisait pas loin de 6 ans qu'il n'avait pas fait de tournée, et ensuite il permet de faire un bilan sur les 10 années qui se sont écoulées depuis Plays Live. Force est de constater que musicalement, la différence entre ces 2 albums live est aussi grande que celle entre le Peter Gabriel de Genesis et celui de ses premiers albums solos. Le style a donc bien changé, passant du rock-prog sombre à de la grande variété internationale. Et pour mieux affirmer cette évolution, aucun titre de ses premiers albums solos ne figurent sur ce live, à l'exception de "Solsbury Hill" qui sonne d'ailleurs décallé par rapport au reste, disons que ce hit des années 70 n'a pas trop sa place ici.
Le contenu de ce double live est essentiellement basé sur les albums So et Us, les plus commerciaux, avec un son énorme et moderne, bien plus agréable que celui de Plays Live qui a pris un sacré coup de vieux. On peut quand même douter de l'authenticité de ce live vu que tout y est parfait; l'ami Peter n'ayant jamais caché son perfectionnisme en studio pour ce qui est de retoucher les lives, histoire de rendre le tout écoutable pour les bonnes gens. Car oui, c'est surtout à eux que ce live s'adresse. Mais on peut pas lui en vouloir car Peter a ce don de composer des tubes succeptibles de plaire à toute la famille, aux plus jeunes (les gens qui découvrent ce qu'est le prog et la carrière de Peter par la même occasion) comme aux plus agés (les mecs qui ont vieilli en meme temps que Peter et qui ont vu leurs goûts musicaux vieillir aussi). Et ces tubes là prennent toute leur dimension en live, surtout les titres de Us qui sont tous joués avec une vraie batterie (Manu Katché) et donc possèdent un vrai putain de groove ("Steam" dans une version qui tue, aaaah ces cuivres et écoutez le Peter tirer un peu sur les aiguës, excellent, idem pour "Digging in the Dirt", ces 2 titres sont d'ailleurs parmi les plus pechus du disque). C'est quand meme mieux que cet infame boite à rythme qui rendait Us un peu soporifique.
Mais à l'inverse, "Washing of the Water" perd un peu l'aspect intimiste qui faisait le charme de la version studio. Enfin, ce morçeau demeure un monument avec une mélodie gabrielienne magnifique. Et des moments aussi forts que ça, le disque en regorge : "In Your Eyes" et "Red Rain", qui au niveau émotions envoient la purée (meme si les refrains sont répétés un peu trop souvent à mon gout, mais bon), "Blood of Eden" qui repose avant tout sur le duo magique entre le chant de 2 sexes opposés, et "Accross the River", une de mes préférées, assez atypique, presque instrumentale (écrit avec Steward Copeland, batteur de Police), ça débute tout doucement avec l'association de longues nappes de claviers et un chant africain, et à la fin, une grande montée en puissance intervient, avec la batterie qui se déchaine, les choeurs "hey hey !!!", terrible, pour ensuite se terminer à nouveau dans le calme où Peter intervient en répétant plusieurs fois "Accross the River", sorte de refrain qui n'interviendrait qu'une seule fois dans la chanson !
En parlant de chant africain, il y a bien quelques influences de world-music ici et là, mais heureusement rien de bien méchant et cela ne dénature pas le style de Peter Gabriel mais au contraire l'enrichit : la "cornemuse" sur "Come Talk to Me", dans le meme style que "Biko", c'est bien le genre de morçeau "hymne à la vie", "on est tous frères", etc..., les sonorités soul-gospel de "Shaking the Tree" (écrit avec Youssou 'N Dour, oui le meme qui avait chanté l'hymne à 2 balles de la coupe du monde 98 avec Axelle Red) qui s'étend sur 9 minutes, j'ai beau ne pas trop aimer ce style un peu variétoche, mais quand c'est à la sauce Gabriel, ça passe comme une lettre à la poste, faut dire aussi que les choeurs sont irrésistibles ! Peter Gabriel pourrait nous faire aimer n'importe quel style ! Enfin, pas tout non plus, quelques titres superficiels poitent leur nez : "Kiss That Frog", un peu trop pauvre et joyeux ce titre, et "Sledgehammer" que tout le monde connait, tout ça est un peu trop people-jack pour retenir l'attention.
Enfin, vous l'aurez compris, ce live est indispensable pour tout amateur de bonne musique (mais pas pour ceux qui crachent sur tout ce qui est commercial) et nous prouve que la variété internationale, ça a du bon.