Pilier du doom/death metal anglais au début des 90's, avec ses compères Anathema et Paradise Lost, My Dying Bride est toujours resté plus ou moins proche de ses origines, alors que les deux groupes sus-nommés ont divergé vers d'autres cieux. Le groupe se permit néanmoins une incartade avec un album expérimental (34,788%... Complete), pour mieux revenir ensuite avec The Light At The End Of The World. Son successeur The Dreadful Hours sera-t-il un retour aux sources ou une nouvelle expérimentation ? La réponse la plus juste serait: les deux à la fois.
Tout commence par le son de la pluie, puis le clavier et la guitare répètent le même plan, une douce mélodie empreinte de mélancolie. Alors que gronde l'orage, les guitares se font plus lourdes, la batterie arrive et Aaron commence, d'une voix plaintive et poignante, à chanter, et tout ne devient plus que désespoir. Et alors que la batterie accélère le tempo, le clavier s'amenuise, le chant devient hurlement, tout devient plus intense et effrayant. Le paroxysme de la chanson est atteint et l'ensemble du groupe ralentit pour laisser place au calme après la tempête. Le lancinant plan de clavier reprend le devant de la scène pour nous laisser reprendre notre souffle après ce déluge malsain et désespérant. L'ambiance est posée dès l'excellente première chanson de The Dreadful Hours: tristesse, désespoir et une touche de terreur (le moment où Aaron hurle « My Hand Brings Doom » est réellement effrayant).
The Light At The End Of The World était un album complexe, avec de nombreux changements de rythmes, et des compositions relativement alambiquées. Sans être non plus prévisibles ou ennuyeuses, les chansons de ce The Dreadful Hours sont plus linéaires. Les changements de tempo restent fréquents, mais sont plus maîtrisés, comme la structure en crescendo – decrescendo de la chanson titre, ou encore "The Deepest Of All Hearts" qui passe du mid-tempo à un rythme plus lent, de la colère à la tristesse. De ce fait, les chansons sont plus compactes, sans pour autant raccourcir leur durée moyenne, qui tourne aux alentours de neuf minutes. La musique devient moins sépulcrale, et plus mélancolique, plus empreinte de tristesse, grâce aux claviers, toujours aussi présents, mais aussi aux guitares, qui se font légères sur certains plans. Cette mélancolie sous-jacente l'album se retrouve bien dans l'énorme titre "My Hope, The Destroyer". Épique, ornée de claviers – violons, cette chanson évoque des sentiments intenses.
Le groupe se permet quelques expérimentations sur ce disque. Utilisant autant sa voix death que claire, Aaron pousse même jusqu'à chanter certains passages avec une voix criarde, presque black métal, qui donne alors un côté plus extrême aux chansons. Sans pour autant revenir à l'ambient de 34,788%... Complete, quelques passages lorgnent vers l'atmosphérique, notamment les voix fantomatiques de "Black Heart Romance". Seule le titre "Le Figglie Della Tempesta" est réminiscente de cet album si décrié, avec son rythme hypnotique et un mélange de chœurs et de bruits organiques en fond durant une bonne partie de la chanson. Cette chanson possède de nombreuses couches et une première écoute sera souvent décevante. Ce n'est qu'après plusieurs écoutes que l'auditeur découvrira toutes les facettes de ce bijou. A l'opposé, "My Hope, The Destroyer" possède un riff, entraînant qui plus est, fait rare pour le groupe.
Cependant, le groupe ne renie pas son passé lointain, preuve en est la chanson "Return To The Beautiful", réécriture de "Return Of The Beautiful" (présente sur l'album As The Flower Withers). Bien lourd, avec Aaron utilisant presque exclusivement sa voix death et se terminant par un passage apocalyptique, ce titre possède une touche old-school bienvenue, ce qui est assez normal en fin de compte. Bien que moins incisives que par le passé (exception faite de l'album 34,788%... Complete), les guitares lourdes sont toujours présentes, et grâce au travail de production de Mags, elles bénéficient d'un son cristallin qui les met très en valeur. Le reste du groupe n'est pas en reste, et chaque instrument est à sa place. Le mixage est de bonne qualité aussi: les pistes atmosphériques ne prennent jamais trop d'espace sonore et restent en fond.
Le groupe du Yorkshire continue son bonhomme de chemin avec ce The Dreadful Hours, pour nous distiller son doom/death si typique, tout en restant à la fois novateur et proche de ce qui a fait leur succès à leurs débuts. Empreint d'émotions, moins morbides et plus tristes que par le passé, qui permettent d'être accrocher à la première audition, il ne dévoilera tous ses secrets que lors d'écoutes successives. Sûrement le disque idéal pour découvrir le groupe, il reste souvent dans le coeur des fans parmi leurs meilleurs albums, même s'il ne révolutionne pas le genre.