Deep Purple dans les années 80 n'a plus qu'un seul objectif: conquérir les maisons de retraite! Et comme Perfect Strangers, The House Of Blue Light devrait faire plaisir aux nostalgiques, ceux qui souhaitent consommer leur dose de rock pour papys tout en restant accrochés à leur vieux 33 tours (parce que c'était mieux avant quand même!). Deep Purple ou le groupe qui vieillit plus vite que son ombre, on devrait les inscrire au livre des records pour ça! Passer d'un groupe jeune et moderne dans les années 70 à des papys complètement gagas dans les années 80, il fallait le faire!
Ah, ils ont quand même fait des efforts cette fois-ci: la production est bonne et audible (pas comme sur Perfect Strangers), Ian Gillan tire un meilleur profit de sa voix cassée et chante presque juste maintenant, Ian Paice réussit à faire sonner convenablement ses rythmes binaires et bateaux. Reste que si la forme est plus attrayante, le fond l'est moins. On sent que Deep Purple ne s'est pas trop foulé pour les parties instrumentales, réduites au strict minimum. Le pauvre Ritchie, dans sa tête, il se croit encore en 1972. Le problème, c'est qu'il est devenu incapable de nous pondre le moindre solo inspiré, et ça n'ira pas en s'améliorant par la suite! Bref, là où Ritchie était encore capable de nous pondre des merveilles à ce niveau sur Perfect Strangers ("Wasted Sunsets", "Gypsy's Kiss"), le voici maintenant contraint d'alléger son jeu et d'aller à l'essentiel. Deep Purple a aussi légèrement « FM-isé » son style, avec quelques synthés présents sur les refrains, mais ça reste raisonnable, The House Of Blue Light est un album de rock avant tout.
A l'instar de Ritchie sur ses solos, le groupe entier semble parfois à court d'idées sur ce disque, sur des morceaux aussi insignifiants que "The Spanish Archer" ou "Strange Ways". Ce dernier titre reprend des sonorités orchestrales qu'on pouvait trouver sur "Hungry Daze" (le seul mauvais titre de Perfect Strangers). "Black & White" est juste sauvé par son refrain, très soigné, comme la plupart des refrains de ce disque, avec parfois des choeurs « FM ». C'est une des principales qualités de The House Of Blue Light, certains refrains sont même très réussis ("Bad Attitude", "The Unwritten Law"), parfois ringards aussi ("Call Of The Wild"). "Bad Attitude" aurait sûrement été considéré comme un classique s'il était sorti dans les années 70, car il a tout du bon rock efficace.
Ian Gillan avait encore de la puissance dans son chant, ce qu'il n'aura plus dans les années 90. C'est entre autre pour ça que The House Of Blue Light est plus énergique que tout ce que fera Deep Purple après, et même sur les albums avec Steve Morse, le groupe ne retrouvera pas une pêche équivalente (un guitariste « satrianesque », ça ne suffit pas toujours si le chanteur est à la masse, cf. Abandon...). Ritchie est encore capable de nous impressionner à quelques reprises; sur "The Unwritten Law" et ses sonorités classieuses, il joue de la guitare comme sur un violon. Il a bien quelques riffs ultimes en réserve, comme celui de "Mad Dog", on peut l'écouter pour la première fois dans un blind test et là, il n'y a pas de doute à avoir, rien qu'à son toucher, on sait que c'est lui!
Ritchie, on ne parle que de lui finalement, et c'est bien normal puisque le boss dans Deep Purple, c'était lui! Il avait une telle emprise sur le groupe qu'on ressent même à certains moments des réminiscences de "Rainbow", sur "Hard Lovin' Woman" et surtout "Dead Or Alive", un titre speed bien balancé qui aurait pu être chanté par Joe Lynn Turner! Un bon petit blues des familles, "Mitzi Dupree", montre bien le plaisir que pouvait ressentir le groupe à jouer ensemble, malgré toutes les tensions.
Au final, The House Of Blue Light est loin d'être parfait. Mais on prend beaucoup de plaisir à écouter ce rock vieillot et démodé, et il n'y a pas à dire, c'est la classe des anciens qui veut ça!