Environ six à sept-mille festivaliers foulent journellement les allées bien achalandées du BYH, soit à peu près autant qu'à une édition récente du
Motocultor. L'endroit sera resté globalement propre durant les trois jours - les gobelets consignés, arme imparable - et sa taille relativement modeste rend aisés les allers-retours entre la grande scène en plein air et l'estrade plus modeste installée en intérieur. Le système boissons/ nourriture est ultra rodé (zéro attente) et les stands de merchandising sont copieusement garnis (mais b..., qu'est-ce que c'est cher, c'était pareil au
RockHard festival !).
En même temps, il y a du pouvoir d'achat, les lieux étant envahis de quadras-quinquas-sexas bardés de cuir et de patches, logiquement attirés par une affiche à très nette coloration heavy tradi. L'ambiance est à l'avenant: pas de pogos, de rares circle pits tout gentillets et... UNE tentative de crowdsurfing observée ! Privilèges de ce weekend tranquille pour le personnel de la sécurité : pas de bousculades, ni de torticolis à force de lever la tête pour repérer de la barbaque en short circulant au-dessus des crânes - honnêtement, c'est reposant. En revanche, l'atmosphère n'est pas hyper festive et hormis un lapin en fourrure rose, tenues rigolotes et accessoires ludiques brilleront par leur absence – les détracteurs de la supposée «
disneylandisation » de certains festivals seront sans doute ravis de l'apprendre. Il convient de rappeler cependant que nos cousins germains adorent pousser la chansonnette et répondent toujours présents lorsqu'il faut faire les chœurs sur un refrain ou hurler tout ce que leur demande le chanteur – pas vraiment «
trve » comme attitude, mais ça participe au réchauffement climatique en l'espèce bienvenu.
Le son ? Excellent. Pour tout le monde. Hormis au
In Theatrum Denonium (mais il faut rappeler que le lieu est très particulier), on aura rarement bénéficié d'un rendu sonore aussi clair et puissant en festival. Revers de la médaille : si un groupe est médiocre, il ne le devra qu'à lui-même, l'excuse «
l'ingé-son est nul » n'étant pas opposable. Heureusement, très peu de prestations susciteront de commentaire aussi négatif. Néanmoins certaines d'entre elles s'inscrivent dans la catégorie «
bien foutus mais pas foufous » qui sied aux efforts méritoires d'honnêtes artisans n’ayant pas eu la chance d'être touchés par le feu sacré, habiles faiseurs voire imitateurs à qui il manque la petite touche de grâce (bon, ok, de talent) pour provoquer autre chose que des salutations polies, ce qui est déjà très bien, d'autant qu'une fanbase plus ou moins conséquente (
Brainstorm !) assure de toute façon un accueil chaleureux à ces vaillants gardiens de la Foi. Dans ces conditions, la lectrice et le lecteur seront régulièrement renvoyés vers l'appréciation du set de
STORMWARRIOR (11h30), première escouade à arpenter les planches répondant à la description ci-dessus. Celle-ci s'adonne à un heavy speed aussi solide que stéréotypé, dotée d'un vocaliste pas spécialement charismatique ou ébouriffant mais qui assure le job, autant par la justesse de ses interventions que ses interactions avec le public.
Débarque ensuite
SORCERER (12h30): du heavy doom sans aspérité et sans grande passion, joué par des Suédois tout en noir. Vite lassant.
La performance suivante sera d'une toute autre intensité. Si les réalisations en studio d'
AUDREY HORNE (13h40) ont parfois pâti d'une production trompeusement aseptisée, à l'exception notable du stimulant dernier LP en date (
Blackout), il en est tout autrement en live. Hyper dynamique, le récital des remuants Norvégiens est bien servi par un chant direct et des guitaristes acérés se livrant à d'homériques duels avec chorégraphies intégrées, sur "This Is War" et "Blackout", notamment. Le bassiste fait le mariole, Toshie est intenable derrière le micro et blague fréquemment avec le public, qu'il rejoint dans la fosse à l'occasion du tube "Waiting for the Night". On ressort des trois-quarts d'heure passés en compagnie des Scandinaves avec le sourire en se disant que tous les concerts de (hard) rock devraient ressembler à ça.
Et moins à celui de
BRAINSTORM (14h50) – cf le commentaire concernant Stormwarrior ci-dessus. Les mecs portaient une chemise blanche sur un pantalon noir – l’élégance à l’allemande - et une fille aux cheveux à moitié bleus est venue se planter au milieu de la scène pour faire de la figuration totalement passive le temps d’un morceau. Mouais.
THE NIGHT FLIGHT ORCHESTRA (16h00). Évidemment. Pas de Sharlee à la basse, remplacé par le même musicien qui avait joué à la place de Forslund - guitariste, rappelons-le - au
Nordic Noise festival de Copenhague. Et il faut admettre que le suppléant s'en sort superbement - "
Paralyzed" n'a jamais sonné aussi disco, d’ailleurs tout le monde se trémousse. Dr Andersson est au comble de la décontraction et enchaîne les clopes comme le premier
Weikath venu - prends bien ça dans les bronches, la campagne anti-tabac.
Brillant de mille feux dans un seyant costume doré, Strid a la patate, assure quasiment tous ses screams et ne met pas longtemps à se faire obéir du public, sans abuser non plus (hein,
Maxou ?). Et les Airlines Annas sont vraiment drôles - l'intermède champ'-serviette de bain sur "
1998" relève quasiment du sketch. Une bonne humeur contagieuse symbolisée par la chenille dans le final et un groove monstrueux: encore un (nouveau) super moment avec l'équipage de la NFO.
S'agissant du récital de
DREAM EVIL (17h20) dont les membres - suédois eux aussi - ont échangé leur créneau avec leurs compatriotes de Hardcore Superstar pour cause d'arrivée tardive de ces derniers, il convient de se référer à ce qui est dit un peu plus haut à propos de Stormwarrior.
Idem pour les Danois vaguement cow-boys d'
I'LL BE DAMNED (17h30) qui inaugurent énergiquement la scène couverte de la «
Halle ».
SOULFLY (18h45), hormis un super solo sorti de nulle part, aura proposé une prestation à la fois mécanique - les morceaux consanguins dopés aux grosses basses qui grésillent - et bordélique, quand Max se met à jouer de son arc brésilien (berimbau, merci wiki) sans qu'on sache vraiment pourquoi. Et puis ces phrases toutes faites, ces «
jump » et «
put your hands up » répétés trente fois en une heure... Tout cela est franchement barbant.
Débarque ensuite le
MICHAEL SCHENKER FEST (20h30), qui se résume à un mélange de cabotinage quasi permanent de la part du guitar hero péroxydé et de bonne humeur surjouée, affichée par des chanteurs soit à la ramasse (Graham Bonnet, tout juste capable d'ânonner «
Doctor, Doctor »), soit affublés d'un look risible (les autres). L'interprétation manque cruellement d'intensité et de fraîcheur malgré la technique plus que correcte des instrumentistes. Un truc rigolo, tout de même : les musiciens arborent exactement les mêmes tenues que sur le backdrop. Et puis il y a Schenker, en mode superstar faussement modeste qui s'acharne à s'adresser (longuement) au public en anglais avec son accent de Hanovre...
S'infliger une telle performance pendant les deux heures et demies (!) prévues relevant du pur masochisme, autant essayer
VENOM INC. (21h10) en intérieur. Le trio emmené par Mantas, le guitariste originel (
Venom tout court étant réservé à son ex-complice Cronos) bourrine comme c'est pas permis sur les premiers titres issus du répertoire récent de cette section parallèle dont l'inquiétant bassiste-chanteur Tony "Demolition Man" Dolan se met en devoir d'imiter son illustre modèle, Cronos donc – mêmes vocaux grognons, mêmes gestuelles derrière un micro réglé très haut à la
Lemmy. Dans ces conditions, un certain malaise s'installe et il est jugé préférable de mettre fin à l'expérience plutôt que d'assister à la prévisible maltraitance des classiques révérés du Venom historique. Afin de finir la soirée sur une bonne note, il reste la possibilité d'assister au show en mode orchestral des besogneux sympho-métalleux de
VISIONS OF ATLANTIS (23h00). Malgré le talent vocal de Clémentine Delauney, c'est évidemment un grand non.
Ainsi s'achève une première journée pour le moins contrastée.