Lorsque David Coverdale a reformé Whitesnake en 2003 après un break d’une petite dizaine d’années, il a promis aux fans trois choses qu’on lui demandait depuis longtemps : un DVD live, un album live et un nouvel album studio. Et il a tenu parole avec respectivement Live in the Still of the Night, Live in the Shadow of the Blues et enfin avec ce Good To Be Bad qui nous intéresse aujourd’hui, premier enregistrement en studio du groupe depuis l’album Restless Heart de 1997, sans compter Into the Light l’album solo de Coverdale de 2000.
Premier constat : contrairement à l’opus de 1997 paru sous le patronyme David Coverdale and Whitesnake qui était plus un album solo assez soft qu’un vrai disque de groupe, le nouveau venu ne laisse aucun doute sur sa nature, c’est un vrai, un pur album de Whitesnake ! Tout commence pourtant de manière plutôt posée avec "Best Years", un mid-tempo mélodique et assez tranquille. La voix du maître des lieux est étonnamment sobre et le restera sur la majorité du disque. Pas de démonstration stérile dans les aigus comme c’était de mise à la fin des 80’s, pas d’imitation du chanteur d’un certain dirigeable, juste le feeling et l’émotion d’un grand vocaliste. Le son se veut particulièrement cru, vraiment proche de ce que le groupe donne en concert. En 2008 on n’a toujours pas fait mieux qu’une bonne vieille Gibson Les Paul branchée dans un bon vieil ampli Marshall ! En cela, et si on rajoute les sons de claviers utilisés par Timmothy Drury, ambiance orgue Hammond old school, on se rapproche de la manière dont sonnait Whitesnake lors de ses premières années, mais en plus gros, plus puissant, afin d’actualiser le son à la décennie actuelle.
L’intensité monte progressivement au fil de l’album, atteignant un premier sommet sur l’excellent "Call on Me", groovy et puissant à souhait avec un refrain énorme. On imagine déjà les dégâts que ce titre va provoquer en concert ! On retrouve avec bonheur tout ce qui fait le charme de Whitesnake, et c’est une joie immense de pouvoir se dire que le groupe est encore capable de pondre des brûlots pareils aujourd’hui ! Comme sur l’ensemble de la galette les guitaristes s’en donnent à cœur joie, Doug Aldrich en tête, à grands coups de riffs et de soli bluesy ou flashy quand c’est Reb Beach qui s’y colle. Première pause avec "All I Want All I Need", ballade telle que Whitesnake en pondait à la fin des 80’s très (trop ?) proche de "Is This Love", sauvée de justesse par la voix de Coverdale. Au rayon des ballades on préférera l’acoustique et laid back "Summer Rain". Mais les choses repartent tout de suite de plus belle : le title-track est une pure tuerie, de quoi faire bander un mort avec son côté sexy à la "Slow N’ Easy" ou "Ready An’ Willing", alors que "All For Love" évoque lui les années 80 mais dans ce qu’elles avaient de mieux chez Whitesnake (on pense notamment à "Give Me All Your Love"). Bref un tube en puissance qui ferait un excellent single.
La fin de l’album se veut particulièrement old school. Que se soit sur "Lay Down Your Love" avec ses chœurs a cappella en intro, sur le vrai 100% pur blues "A Fool in Love" ou encore sur le déchaîné "Got What You Need" qui va à 100 à l’heure et aurait carrément eu sa place sur Trouble, on nage en plein 70’s. Mais tout ceci ne donne aucunement une impression de nostalgie ou de « c’était mieux avant ». Le style du groupe est certes daté, mais il reste étonnamment actuel surtout en cette période de revival rock. Sur ces morceaux qui bougent vraiment la basse très présente de Uriah Duffy et la batterie de Chris Frazier (peut être moins puissant mais plus subtil que Tommy Aldridge) font des merveilles. Il fallait quelque chose de grand pour finir un tel album, "‘Til the End of Time" ne déçoit pas. Ce sublime morceau acoustique à consonance folk est dominé par une ambiance mélancolique que la voix de Coverdale retransmet avec une classe folle, réussissant à faire naître en l’auditeur des sentiments profonds, rappelant des souvenirs passés douloureux, ou provoquant une émotion inédite et inexpliquée. Tout simplement beau et touchant.
Cet album est donc une réussite sur toute la ligne. Coverdale semble l’avoir abordé sans aucune pression, avec pour seule volonté celle de se faire plaisir, et de faire plaisir à ses fans. Le résultat est magnifique, loin d’un trip nostalgique visant à rappeler au vieux fan bedonnant ses premières amours, et regroupe en onze nouvelles compositions le meilleur de ce que Whitesnake a fait dans sa carrière, en privilégiant les influences bluesy des débuts du groupe. Cet album deviendra-t-il un classique ? Sera-t-il le dernier du groupe ? Peu importe finalement, seul le temps le dira. En attendant qu’est-ce que c’est bon d’être un mauvais garçon !