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CHRONIQUE PAR ...

39
Pietro
Cette chronique a été mise en ligne le 01 juin 2021
Sa note : 16/20

LINE UP

-David Coverdale
(chant)

-Mel Galley
(guitare)

-Mickey Moody
(guitare)

-Jon Lord
(claviers)

-Colin Hodgkinson
(basse)

-Cozy Powell
(batterie)
+
-John Sykes
(guitare sur la version US)

-Neil Murray
(basse sur la version US)

TRACKLIST

Version Européenne
1)Gambler
2)Slide It In
3)Standing in the Shadow
4)Give Me More Time
5)Love Ain't No Stranger
6)Slow an' Easy
7)Spit It Out
8)All or Nothing
9)Hungry for Love
10)Guilty of Love

Version Américaine
1)Slide It In
2)Slow an' Easy
3)Love Ain't No Stranger
4)All or Nothing
5)Gambler
6)Guilty of Love
7)Hungry for Love
8)Give Me More Time
9)Spit It Out
10)Standing in the Shadow

DISCOGRAPHIE


Whitesnake - Slide It In
(1984) - hard rock - Label : Geffen Records



Certaines chroniques de disques se concentrent sur la musique et la musique seulement, alors que d’autres font figure de récit parfois interminable sur les circonstances de l’enregistrement d’un album. Avec un groupe à la carrière tumultueuse comme Whitesnake la seconde catégorie s’impose souvent, et tout particulièrement dans le cas de ce Slide It In, album existant en deux versions avec deux line up différents ! Quelques explications s’avèrent nécessaires…

C’est donc parti pour un petit retour au début des années 80. Whitesnake étant à présent signé chez l’ambitieux label américain Geffen Records, un certain John Kalodner (A&R supposé avoir les meilleurs oreilles du business et faisant la pluie et le beau temps sur le rock US des 80’s) est jeté dans les pattes de Coverdale afin de lui prodiguer des « conseils d'ami » sur sa façon de voir la musique du groupe. Et il n’y va pas par quatre chemins : d’après lui le nouveau line up monté par le chanteur après la sortie de Saints & Sinners n’est pas au niveau et n’a aucun potentiel commercial, tout comme le style de production daté de Martin Birch, ancré dans les 70’s. Inutile de préciser que le chanteur, passablement irrité par cet inconnu qui croit tout savoir, ne tiendra pas compte de ses conseils, en tout cas dans un premier temps. Le groupe part donc enregistrer le nouvel album à Munich, seulement interrompu par sa prestation en tête d’affiche aux Monsters Of Rock de Castle Donington, filmée pour la première vidéo du groupe.

De retour en studio, les choses se passent bien mieux que pour l’opus précédent. Après le renvoi du producteur Eddie Kramer imposé par Kalodner et le rappel au bercail de ce bon vieux Martin Birch pour terminer le boulot, l’album sort en Europe en Janvier 1984. Il s’agit de la première collaboration entre Coverdale et Mel Galley au niveau du songwriting et le résultat est prometteur, le sens mélodique du nouveau guitariste faisant des merveilles. Seul Mickey Moody se sent un peu mis à l’écart, une seule de ses compos étant retenue (l’excellent et Zeppelinien "Slow an’ Easy"). Il quitte donc le groupe à la fin de l’enregistrement, cette fois définitivement. Après avoir envisagé d’engager Michael Schenker ou Adrian Vandenberg (ça sera pour plus tard), Coverdale décide de faire appel à John Sykes, rencontré lors d’une tournée avec Thin Lizzy. Par ailleurs DC, peu enthousiasmé par Hodgkinson, décide de rappeler Neil Murray. Le chanteur accepte enfin de faire remixer l’album pour sa sortie US en avril par le producteur Keith Olsen à la condition de laisser Sykes et Murray réenregistrer les parties de Moody et Hodgkinson.

On se retrouve donc avec deux versions du même album : une européenne dans l’esprit de ce que propose Whitesnake depuis ses débuts (au son il est vrai un peu plat), et une américaine remixée avec la présence des nouveaux membres du groupe (même si Sykes a seulement réenregistré quelques solos). Le nouveau mix clinquant et beaucoup plus dynamique laisse la part belle aux guitares et à la batterie dans un esprit très années 80, au détriment du clavier de Jon Lord et de la basse. Le tout sonne donc moins groovy, moins « roots » mais plus policé, en accord avec les standards rock américains de l’époque. Pour Coverdale, fou de rage, l’album a perdu ses « couilles Britanniques ». Il détruira même la copie envoyée par son label, avant de se raviser lorsqu’il commence à entendre ses chansons en boucle sur les radios US. Kalodner connaît son boulot, il a su adapter Whitesnake aux standards américains et a permis au groupe d’obtenir son premier gros succès, dès sa première sortie américaine. Slide It In finira en effet double platine.

Il faut dire aussi que l’album est très bon, quelle que soit la version. Le groupe a retrouvé un sens de la composition un peu oublié sur l’opus précédent. On retrouve dans certains morceaux le style et l’esprit blues rock qui animent Whitesnake depuis ses débuts ("Standing in the Shadow", le groovy "Gambler"), mais on a aussi affaire à des nouveautés. Des titres comme "Slide It In", simple mais efficace, l’excellent et mélodique "Give Me More Time" ou surtout le tube ultime qu’est "Love Ain’t No Stranger" (récit autobiographique d’un Coverdale surpris en plein adultère!) sont plus directs que tout ce que le groupe a proposé jusque là. Ils font preuve d’une efficacité redoutable, difficile de se les sortir de la tête ! Coverdale a voulu accentuer l’aspect rock direct de son groupe, et la mue est un succès. Seul le single "Guilty of Love", très léger et presque pop, va peut être trop loin dans cette nouvelle direction et perd un peu de la profondeur habituelle du groupe. Quant au sympathique "Hungry for Love", il prouve que Coverdale a retrouvé toute sa verve lorsqu’il nous expose le problème principal dans sa vie (« So many women an' so little time »…).


Slide It In est donc une grande réussite, alors qu’il a été réalisé dans des conditions difficiles : instabilité du line up et de l’entourage du groupe, changement d’orientation musicale, adaptation du son et du style à une nouvelle époque… Mais Coverdale a réussi son pari car il a su se remettre en question. Sa collaboration avec Mel Galley sera malheureusement de courte durée, le guitariste devant quitter le groupe pendant la tournée suite à une blessure au bras, laissant Sykes seul guitariste. Lord partira aussi pour rejoindre un Deep Purple renaissant de ses cendres. Le groupe sera donc de nouveau chamboulé mais continuera dans le style amorcé par cet album important, véritable pivot dans sa carrière.


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