War Party relate l'entreprise de destruction massive menée par le parti politique du même nom, dévoué à l'avènement de la Guerre Totale : religion, corruption, violence sociale ou encore une version Transformers du défunt président Reagan sont autant de thèmes et d'images abordés au cours du second album de l'ère «GWAR Works Best With Metal», entamée par un Violence Has Arrived épouvantable. Et comme disait l’autre : «la route est droite…»
Enfin, d’un point de vue strictement metallique, War Party a l’air déjà plus crédible que son prédécesseur. Les musiciens sonnent toujours comme des musiciens de metal on ne peut plus génériques, sans aucune personnalité ni trait distinctif, mais proposent une musique beaucoup plus technique : les morceaux sont bourrés de breaks, d’accélérations et de ralentissements ; les riffs sont ciselés, carrés, extrêmement précis et Brad Roberts soutient tout ça de son jeu solide et frontal. De son côté, Dave Brockie a légèrement levé le pied sur les aboiements inintelligibles, favorisant une forme d'exhortation gutturale plus en adéquation avec son personnage. La basse est inexistante, par contre. Bref, il y a des efforts de composition tout à fait objectifs pour la première fois depuis que GWAR a viré sa cuti. Mais voilà, c’est chiant. Mais vraiment. Oh, il y a bien quelques riffs et rythmes sympas de temps en temps, notamment dans "Bring Back The Bomb", mais ça se termine presque systématiquement par des ralentis fatigants qui rallongent des morceaux pas spécialement aguicheurs au départ. Pareil pour "War Party" qui, après un début efficace, s'enlise au bout d'une minute à peine dans un enchaînement bête et lourd d'accords guindés, avant de repartir - trop tard, parce que le morceau est gâché.
En plus de ça, « metal crédibilité » oblige, on a droit à de bon vieux mid tempos ("Decay of Grandeur", "Bonesnapper", "Lost God" et "Fist Full Of Teeth") insupportablement solennels et poussifs. Quand on repense à "Sammy" sur Cärnival of Chaos, morceau de bravoure stonero-shamanico-épico-bolero, c'est d'une oreille attristée qu'on subit ces horreurs d'une prétention et d'une vulgarité musicales sidérantes, héritées d'on ne sait quels éléphants constipés du thrash ou du heavy dont GWAR se riait, avec justesse, à peine dix ans auparavant. D'ailleurs, en parlant de ce genre de groupes, notons que "Krosstika" est affublé du riff, même pas camouflé, étoffé, ralenti ou que sais-je, de "Holy Wars" de Megadeth. Pourquoi être allé piocher, aussi grossièrement qui plus est, dans un registre aussi douteux qu'aliénant ? Non seulement le passage au thrash a signé chez GWAR une régression artistique spectaculaire, mais en plus ils sont devenus des espèces de seconds couteaux tout juste bons à recycler du déjà entendu ! Il y a bien "Womb With A View", un des seuls morceaux à ne pas ralentir sans aucune raison valable, pour légèrement relever le niveau même s'il ne pèse rien dans la balance face à la furie punkoïde des versions live, et "The Bonus Plan", au riff très probablement piqué à un morceau d'Agnostic Front, pour combler les fans de thrash beuglé en Québécois.
Concernant les éléments de satire sociale qui constituent le tissu thématique de l'album, il faut se rendre à l'évidence que GWAR n'est plus choquant (en studio, du moins). Méchant et ironique, d'accord : «the Reaganator used fossil fuel, some people never learn/and for this lack of vision your country will fucking burn/you see the Reaganator lying flat on his ass?/Quite simply he ran out of gas». Mais choquant, non. A croire qu'à partir du moment où leur musique est devenue dramatiquement commune et sans saveur, ils ont aussi perdu cette étincelle qui leur permettait de se jouer des tabous sociaux et de cultiver une certaine liberté de ton qui faisait d'eux des membres notables du panthéon des fauteurs de trouble, aux côtés de groupes comme les Dead Kennedys ou Ministry. On trouve bien quelques paroles rigolotes ici et là, qui rapellent la belle époque des references au crack et à la monstruosité du Sud des Etats-Unis : «so we hold our rallies and give out free crack/Then we give guns to the poor/Our staffers are making obscene phone calls right now/soon they will kick down your door» ("Krossitka") ou encore «cut off his penis and shoved it in his mouth/just like they do down south» ("You Can't Kill Terror"). Mais la musique est tellement peu accrocheuse qu’on passe facilement à côté.
Finalement, War Party, c'est exactement ce que le béotien attend de GWAR : une musique inintéressante et pas inventive qu'on pardonne (ou pas) parce que les concerts sont uniques et rigolos. Quelques efforts ont été faits au niveau des paroles et pour complexifier les morceaux, mais ça reste quand même très tiède. Les amateurs de thrash moderne « bien produit » (c'est-à-dire au son plat et glacial), « juste » efficace et exécuté avec une précision chirurgicale peuvent rajouter 4, 5 voire 6 points à la note.