Un album live pour fêter l'arrivée du Ripper, après seulement un album studio avec Judas Priest, voilà une sortie qui pouvait paraître un peu présomptueuse. Jugulator, acclamé par la presse, marquait le retour du Priest après 7 longues années d'absence discographique, la demande était forte. Tim Owens avait largement fait ses preuves avec Jugulator et le dernier live en date (Priest... Live !) remontait à plus de 10 ans donc Live Meltdown tombait à point nommé. Qui plus est, c'était l'occasion idéale pour les fans de pouvoir vérifier ce que valait Ripper sur les vieux titres.
Sûr de son fait et persuadé d'avoir déniché la perle rare après plusieurs années de recherche, Judas Priest tenait à marquer le coup avec ce live et à fermer une bonne fois pour toutes le chapitre des années Halford. Oui, Ripper remplace Rob sans problème et même mieux, il le surpasse aisément... techniquement s'entend ! Le groupe le criait haut et fort pendant les interviews à l'époque, les capacités vocales de Ripper sont supérieures à celles d'Halford. Là-dessus, aucun souci, tous les passages les plus chiadés du Priest, les aigus les plus saugrenus, aucun de ces défis n'est insurmontable pour lui. Simplement, et on s'en rend bien compte à l'écoute de ce live, surtout sur les classiques de l'héritage Halford, Ripper n'a retenu que la technique... rien d'autres. Les approximations que pouvait avoir Rob Halford en live, Ripper les balaie d'un revers de main, il recherche la perfection avant tout. Simplement, il a juste oublié une chose en route : l'émotion.
Comme une bonne partie des titres de Live Meltdown proviennent logiquement de Painkiller et Jugulator, on pourrait se dire que l'émotion importe peu, la froideur et la puissance avec laquelle Ripper les interprète est tout à fait adaptée. D'autant plus que Jugulator ne fait que reprendre le bourrinage qui avait déjà été entrepris sur des titres agressifs comme "Painkiller" et "Metal Meltdown" donc là-dessus, rien de surprenant, la présence de Ripper et Scott Travis permet de moderniser le son du Priest. Ceci dit, pour la version de "A Touch Of Evil", on aurait aimé entendre autre chose que les grognements « power-metal » de Ripper, même remarque pour le refrain de "Beyond the Realms of Death" d'ailleurs ! M'enfin nous sommes en 1998, l'heure est au hardcore bourrin, aux beuglements en tout genre et aux guitares sous-accordées, Judas Priest ne fait que s'adapter à son époque comme il l'a toujours fait. Reste à savoir si ces sonorités modernes vont de pair avec les vieux classiques heavy du Priest... et là le bilan est plus mitigé. Déjà, avec ces guitares accordées un ton plus bas, les solos de la paire Tipton – Downing sont plus ou moins massacrés, ils perdent pas mal de leur intérêt. En plus, certains morceaux sont légèrement ralentis, sûrement dans le but de leur donner plus de lourdeur... c'est réussi pour le coup ! Bref, épais, moderne, lourd, le nouveau son du Priest tient compte des exigences du marché, il faudra faire avec.
Tant pis si Scott Travis interprète les mid-tempos d'une façon relativement banale, mécanique, sans vie, avec autant de feeling que le batteur de Manowar (c'est-à-dire aucun). Quelle importance ? Tant pis si Ripper a tendance à surjouer son rôle de « Metal God », à le prendre un peu trop au sérieux et à exagérer ses intonations power-métallisantes quand il interprète les classiques. Quelle importance ? Qui d'autres que Ripper pouvait remplacer le Metal God ? Il suffit de bien réfléchir à cette question. Ralph Sheepers ? La bonne blague... trop « speed mélo » pour être honnête, comme ça la question est réglée. Tim Owens était la bonne personne, même s'il restera à jamais le « second », le remplaçant de quelqu'un et ce sera également valable pour la suite de sa carrière (Iced Earth, Yngwie Malmsteen).
Ne soyons pas trop négatif, ce live là a plus de puissance que Priest... Live ! qui était issu de la tournée Turbo. Les métalleux apprécieront sans problème ce nouveau son, d'autant plus que la set-list est béton, la plupart des classiques sont présents. Et certaines versions ont vraiment de la gueule sous cette forme comme "Metal Gods" (un sacré hymne à reprendre en chœur !), "Grinder", "Electric Eye", "Hell Bent for Leather" et "You've Got Another Thing Comin'", même si Ripper a tendance à en rajouter sur les refrains. Il ne faut pas oublier non plus "Diamonds and Rust", interprétée ici comme une ballade acoustique, c'est la seule fois d'ailleurs où Ripper fait preuve de nuance et de sensibilité sur ce live (la version de "Beyond the Realms of Death" est plutôt ratée, trop lourde !). Il faudra attendre Demolition et ses ballades pour voir enfin s'exprimer une autre facette du talent de Ripper. Et que dire des titres speeds comme "Night Crawler", "Painkiller", "Metal Meltdown" et "Rapid Fire" ? Dans ce registre, le Priest écrase tout et "Rapid Fire" sous cette forme surpasse même la version originale, plus de patate et Scott Travis y est redoutable de technicité !
Même si issu d'une des moins bonnes époques du Priest, Live Meltdown avait surtout de l'intérêt à l'époque de sa sortie étant donné que les fans avaient à l'idée que Rob Halford ne reviendrait jamais dans le groupe. Maintenant, depuis le retour du Metal God, forcément l'intérêt n'est plus le même si ce n'est de garder un témoignage live de qualité avec Ripper, avec une prestation bien supérieure ici à ce que le Metal God nous proposera à son retour.