"Comment en est-on arrivé là ?" se demandera l’amateur. "Serait-ce la faute au punk ? Au public ?" Et si c’était simplement parce que la majorité des groupes de prog n’avait plus grand-chose à dire lorsque les années 80 sont arrivées… Toujours est-il que les amateurs de Yes avaient plus ou moins vu le coup venir. Tormato montrait déjà de grands signes de faiblesse et sa succession, Drama, signa même la fin du line-up « classic Yes » pour de bon (même si cet album est bizarrement excellent). La cohésion du groupe était donc au plus bas et la grande purge sonore des années 80 commençait gentiment à s’imposer… Oui, ça sentait clairement le sapin.
Pour survivre, Yes a donc dû s’adapter… logique. Et pour sa transformation, Yes va faire appel au talentueux Trevor Rabin qui guidera le groupe sous les traits d’une simple formation pop rock. Et ça va marcher ! Car cet album sera un énorme succès, notamment grâce au meta multi archi connu "Owner Of A Lonely Heart" et son riff reconnaissable entre mille. 90125 est donc un album de pop bien léchée, bien produite et souvent très efficace. Le disque s’écoute donc sans trop de peine. Oui mais voilà, si l’orientation du disque permettra au groupe de survivre, ne fallait-il pas plutôt le laisser mourir en paix ? Car c’est tout de même diablement lisse, formaté et consensuel. La pop n’est pas un vilain mot, elle peut être même parfois très agréable, je suis le premier à le reconnaître. Mais, diantre, il ne s’agit pas de n’importe quel groupe mais des parents de Close To The Edge ! La pilule est forcément difficile à digérer pour les amateurs. On tente de rester objectif, de ne pas être obtus mais "It Can Happen", c’est tout mou ! et que dire d’un morceau comme "Our Song", certes bien rythmé mais aux mélodies d’une niaiserie sans fond ! Et ce n’est pas les sympathiques parties de Rabin (qui se débrouille tout de même très bien… mais Howe nous manque) qui me feront changer d’avis.
Reste tout de même un morceau instrumental de deux minutes ! Si si ! Son nom ? "Cinema". Oui je trouve aussi que c’est original. Ça ferait une bonne intro pour un morceau fleuve et l’on cherche désespérément les dix-huit minutes restantes. En vain. Heureusement, Yes n’est pas tout a fait mort et nous le prouve avec l’excellent "Changes". Un morceau vraiment bon qui, pour le coup, mélange avec beaucoup de finesse parties progressives et pop. C’est aussi sur ce titre que les chants de Rabin et Anderson se marient le mieux. Ha si tout l’album avait été du niveau de ce titre… Le groupe serait sans doute six pieds sur terre car il n’aurait sûrement pas eu le même succès ! Moi, mauvaise langue ?
Il n’y a au final pas grand-chose à ajouter ! Oui cet album tient la route, car faire du Rock FM de qualité, ce n’est pas si simple. Oui c’était sans doute un passage obligé pour le groupe. Oui, grâce à ce disque, les gens hochent la tête quand vous parlez de Yes. Mais il semble clair qu’à partir de 90125, jamais plus nous n’aurons la chance d’entendre un morceau tel que "Gates Of Delirium". Ainsi va la vie. Mais, malgré tout, il serait vraiment malhonnête de descendre complètement le disque sous prétexte d’un passé glorieux ! Après tout, ce 90125 aurait pu être cent fois pire et il faut bien reconnaître le travail, certes pas supra créatif, mais bien torché du groupe. Ne soyons pas manichéen, reconnaissons les quelques qualités du disque et pleurons nos morts engendrés par la grande guerre musicale des 80’s ! R.I.P progressive music (mais pas pour longtemps) !