Finalement, est-ce que ce n’est pas Grave Digger qui a trouvé la bonne formule pour faire de la musique de manière pérenne sans trop se fouler? En fait, c’est simple, vous embauchez un compositeur principal au poste de guitariste, vous le faites bosser jusqu’à ce qu’il n’ait plus d’inspiration, puis vous le virez et en prenez un autre à la place. Cela permet de se renouveler un minimum à peu de frais et de ne pas sombrer dans l’oubli avec un musicien rincé qui n’a plus rien à dire.
C’est la troisième fois que nos Teutons expérimentent cette recette, et même si l’on pourrait discuter de ce choix, ils s’en sont plutôt pas mal sortis jusque-là. Pour preuve, l’album précédent, The Clans Will Rise Again, était plutôt réussi et apportait un relatif vent de fraîcheur à une discographie déjà bien chargée. Clash of the Gods est donc l’occasion pour ce nouveau line-up de confirmer ou non tout le bien que l’on a pu en penser. Et si ce n’est pas dans la sympathique introduction qui nous trouverons l’information, ni dans l’opener, on pourra néanmoins se réjouir d’entrée de voir que Grave Digger n’a jamais perdu son savoir faire en la matière : riff percutant, refrain beuglé dans les règles... et, surprise, quelques notes de synthé lead néo-classique sur le passage central! On aura tout vu. Malheureusement, c’est en fouillant plus avant dans cet album que l’on se rendra compte du manque de fond de celui-ci. Le souffle épique qui habitait le The Clans Will Rise Again semble aux abonnés absents et a été remplacé par une série de titres composés en pilotage automatique et tous interchangeables.
On pourra bien sauver quelques passages ci et là, comme le refrain de "Medusa" ou le solo de "Helldog", mais autant dire qu’il faudra se forcer et que ça ne sauvera pas ces titres somme toute moyens. Le problème, c’est que quand on s’appelle Grave Digger, on n’a déjà pas beaucoup de marge de manœuvre. Et encore, sans parler des titres ou rien ne retient l’oreille, et pourtant il y en a. Donc, faute d’inspiration, qu’est ce que l’on peut bien faire? Quelques appels du pied à un passé plus glorieux bien sûr! Le refrain de "Walls of Sorrow" rappelera ainsi fortement celui du bon vieux "Lionheart". Il faudra attendre "Call of the Sirens" pour que l’album attire à nouveau notre attention à l’occasion de couplets plus mesurés, ce qui n’est pourtant pas vraiment le fort de nos Teutons. Il suffira d’entendre Chris beugler sur les couplets pour s’en persuader. On passe ensuite la seconde (enfin!) avec "Warriors Revenge", mais la tentative d’accélération est vite avortée, la faute à un refrain pas très inspiré. Allez, beaux joueurs, on retiendra quand même le mid-tempo éponyme bien lourd, qui fait son petit effet, ou alors la plus épique "Home at Last".
Dommage, donc, que l’essai ne soit pas transformé. Clash of the Gods est un album à classer dans la partie creuse de la discographie bien fournie des Allemands, section déjà hélas bien remplie depuis quelques années. Dommage, donc, que dès le deuxième album, l’arrivée de Axel Ritt n’apporte plus rien d’intéressant. Cela dit, ne perdons pas espoir. Rappellons nous du moyen Rheingold qui avait par la suite permis au groupe d’accoucher de l’excellent The Last Supper.